mardi 31 janvier 2012

LES REVOLUTIONS ARABES, UN AN APRES...



Photo: La Presse Canadienne /AP/Muhammed Muheisen. Des milliers d'Égyptiens sont rassemblés place Tahrir.
Source : http://www.radio-canada.ca/nouvelles/International/2012/01/25/002-egypte-revolte-premier-anniversaire-25-janvier.shtml


L’année 2011 restera marquée dans les annales de l’histoire par les révolutions arabes. Ce à quoi personne n’osait penser s’est produit : des régimes dictatoriaux, sédimentés par plusieurs années de règne sans partage, se sont écroulés les uns après les autres, face à la pression de la rue. Ben Ali prend la fuite, au bout de 18 jours de pression et de répressions de la rue, Hosnie Moubarak démissionne ; après plusieurs mois de répressions, de combats violents contre les rebelles appuyés par les troupes de l'OTAN (une première en politique internationale) Kadhafi est tué dans des conditions qui restent à élucider et qui peut-être, ne le seront jamais. Un an après, il est peut-être permis de risquer quelques réflexions en termes de bilan provisoire d'un mouvement toujours en cours.
Si en Tunisie, le samedi 14 janvier dernier a été l’occasion d’une grande fête populaire sur l’avenue Bourguiba, en souvenir de la chute du dictateur Ben Ali, des élections libres et transparentes du 23 octobre dernier, plusieurs interrogations demeurent et des incertitudes se profilent à l’horizon. Le Figaro du (14 - 15 janvier 2012, p. 6) rapporte les propos de Azza Turki, journaliste tunisien à l’hebdomadaire Réalités : « nous avons un gouvernement légitime mais nous sommes dans le flou total. Et les signaux que nous envoie le nouveau pouvoir ne sont pas rassurants… » Comme on pouvait s’y attendre, la chute des dictateurs n’a pas réglé le problème du chômage qui, rappelons-le, a été l’une des bases de la révolte. Les basses classes et la jeunesse continuent de broyer du noir et ne manquent plus d’exprimer leur impatience. Dans l’un des berceaux de la contestation contre Ben Ali, plus précisément à Kasserine, le président Moncef Marzouki, le président de l’Assemblée constituante Mustapha Ben Jaafar, et le chef du gouvernement l’islamiste Hamadi Jebali ont essuyé les huées de la foule. Ce n’est pas anodin.

A cela, il ne faut pas oublier la victoire des islamistes dans la plupart des révolutions arabes. Ces partis contraints à la clandestinité sous les régimes précédents ont pris la voie royale pour accéder au pouvoir. Ils sont finalement les grands gagnants des révolutions arabes. Etait-ce là la volonté de ces jeunes manifestants qui n’hésitaient pas à sacrifier leurs vies en manifestant contre les dictatures ? Rien n’est moins sûr. La logique du pouvoir démocratique veut que qui gagne les élections gouverne. Pourquoi s’étonner d’une islamisation rampante de la société, nomination des islamistes dans les principaux organes de l’Etat, recrudescence du niqab dans les rues, manifestation des salafistes en vue de son introduction dans les universités, une certaine police des mœurs… Jusqu’où va tenir cet équilibrisme des gouvernements d’islamistes en alliance avec les modérés et libéraux ? Les incidents mineurs qui ont émaillé la première assise de la nouvelle assemblée égyptienne sont assez éloquents.

Une chose nous paraît sûre, une démocratie à l’Occidentale relèverait d’un rêve. En effet, l’Occident a réalisé en quelques décennies cette expulsion du religieux de l’espace public pour y introniser la raison. Le religieux est relégué totalement dans l’espace privé, et une vigilance, sous le nom de laïcisme, est montée pour éviter son interférence ou son retour dans le débat public. Et c’est avec ses lunettes que l’Occident lit et interprète l’histoire des autres peuples. Les pays arabes tout comme les pays africains du Sud-Sahara sont loin de réaliser cette séparation qui vire à l’antagonisme entre le religieux et le politique. En se jetant aux côtés de la rue arabe contre les dictatures qui leur devaient en partie leur longévité, les pays occidentaux rêvaient de voir s’établir des démocraties comme les leurs. D’où les appréhensions actuelles face à l’évolution de la situation des ces pays où se croisent désormais plusieurs visions de la liberté et plusieurs lectures de la place de la religion dans le débat public. Des dictatures politiques et militaires sont tombées, mais il faut craindre que d’autres, fondées sur la religion, ne s’érigent à leur place. Elles pourraient susciter de nouvelles  révolutions qui ne produraient pas facilement les mêmes résultats que les premières.
P. Eric Oloudé OKPEITCHA

samedi 28 janvier 2012


IVe DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE B

COMMENTAIRE D’ENSEMBLE DES TEXTES

(Dt 18,15-20 / 1 Co 7, 32-35 / Mc 1, 21-28)

CHRIST JÉSUS PAROLE DE DIEU QUI LIBÈRE…!


L’évangéliste Marc est plus intéressé par les actes du Christ que par ses discours. En effet, l’évangile de ce dimanche ne donne pas le contenu de l’enseignement de Jésus à la synagogue. C’est la personne du Christ même qui est au cœur de cet enseignement, c’est Lui le Verbe puissant de Dieu qui démasque le mal en nous et le détruit.

1.     Le Seigneur fera lever un prophète !


Dieu prend toujours l’initiative de relever son peuple de la misère, d’assouvir sa faim et sa soif de la Parole de vie en suscitant un prophète « comme Moïse ». Il sera prophète issu du milieu du peuple de l’alliance et non d’ailleurs. Il est et sera le médiateur de l’alliance et porteur d’une seule Parole, la Parole qui vient de Dieu. En l’écoutant c’est Dieu même que nous écouterons. Le primat de l’écoute sur lequel insiste le deutéronome, fait voir la valeur et la qualité du service du prophète par excellence, continuité de la figure de Moise, figure du Messie qui vient. L’écoute de sa parole est écoute du Verbe, expression de la puissance de Dieu qui nous récrée et de la communion personnelle avec Lui. Cette communion fait naître en nous l’événement nouveau de sa grâce qui libère.

2.     Un enseignement nouveau donné avec autorité !


L’enseignement du Christ dans la synagogue de Capharnaüm est annonce de cette nouveauté du Règne de Dieu qui surprend et émerveille. Enseignement donné avec autorité, il se montre, Parole de Dieu qui rompt avec les commentaires des scribes, avec tout enseignement du passé et des faux-prophètes d’hier et d’aujourd’hui. La Parole de Jésus vient comme la révolution de nouveauté qui seule peut nourrir l’homme, et seule peut détruire en nous les nombreuses chaînes  d’esclavage et d’illusions modernes mortifères. Dans la Parole de Dieu proclamée et accueillie, enseignement et délivrance du mal (exorcisme) vont de pair. L’écoute et l’accueil de l’Évangile ou de la Parole provoquent l’intervention personnelle de Dieu en notre vie et en notre histoire. Dieu en personne entre dans notre vie personnelle et y engage un dialogue, force de conversion qui libère et procure à l’homme sa vraie dignité. L’homme jadis tourmenté peut et doit désormais reconnaître et proclamer l’identité du Christ, le Saint de Dieu, son Envoyé, Dieu Lui-même.

3.     Être attaché au Seigneur sans partage


L’état de vie que chacun choisit est le lieu et l’espace concrets d’accueil du Christ et de consécration libre de soi à la Parole de Dieu : « soyez attachés au Seigneur sans partage. » Les tumultes de notre vie et les soucis de toutes sortes risquent d’éteindre en nous cette force novatrice de Dieu et le désir d’annoncer Christ qui nous conduit aux nouveautés du Royaume des cieux.
P. Chelbin Alfred Wanyinou HONVO


vendredi 27 janvier 2012

ZONE EURO, LES HABITUDES ONT LA PEAU DURE

Vendredi 13 janvier, l’agence de notation Standard & Poor’s a procédé à la dégradation de la note de neuf pays européens dont la France, un des deux piliers de la zone euro qui a perdu son triple A. L’Italie et l’Espagne connaissent un abaissement de deux crans, tandis que l’Allemagne le vrai moteur de la zone euro conserve son AAA. L’événement qui n’en est vraiment pas un du point de vue économique, était attendu depuis fort longtemps. Les Etats-Unis ont perdu leur triple A en aout dernier ; la France, avec ses difficultés et ses faiblesses, n’avait plus sa fiabilité d’antan, et son taux d’emprunt sur les marchés internationaux était supérieur à celui de l’Allemagne par exemple.
Pour la France, cette nouvelle sonne comme une sanction de la politique économique de son président, candidat probable tout au moins non déclaré aux élections présidentielles devant se tenir dans quelques semaines. Plus que cela, la super-activité de la France dans la gestion de la crise de la zone euro, pourrait prendre un coup face à l’Allemagne. Au-delà de l’aspect économique, on ne saurait négliger le volet politique en termes d’image sur le plan international. Deux « Europes »émergent de cette notation ; d’un côté, l’Europe du Nord avec des politiques budgétaires strictes et de bonnes perspectives de croissance chapeautée par l’Allemagne (du point de vue économique et non géographique). Cette Europe occupe moins le devant de la scène, sur le plan international. De l’autre, l’Europe du Sud affaiblie par les difficultés économiques sans grandes perspectives de croissance et dans laquelle France est en train de faire un sérieux plongeon. Les réactions des hommes politiques des pays ayant connu la dégradation ne se sont pas fait attendre. Certains contestent la méthode de ces agences ; d’autres demandent de se passer d’elles… en somme une tentative de minimiser l’événement dans le but d’apaiser les populations; ce n'est qu'une fuite en avant. Et c’est là le problème.

Pour plusieurs économistes, la situation actuelle s’explique par le fait de remettre à demain les réformes nécessaires tentant de soutenir un mode de vie et de fonctionnement qui ne peut plus tenir pendant longtemps. L’Occident doit se rendre compte aujourd’hui qu’elle est à la croisée de son histoire avec la perte progressive du statut du pôle économique en train de glisser sérieusement vers d’autres coins de la planète. Que vaut l’économie sans la population ? L’une des richesses de la Chine sinon la première, c’est sa population. En Europe, le vieillissement de la population est un état de fait avec de faibles perspectives d’amélioration et d’importants signaux préfigurant le pire. Le système de croissance illimitée basé sur le capital et la consommation illimitée renforcée par la publicité et l’obsolescence programmée des produits, donne des signaux d’alerte qu’il faut discerner. En clair, le mode de vie et de fonctionnement actuel des Etats européens ne peut continuer pour longtemps. La rigueur et l’austérité s’imposent comme condition de survie. Vivre au-dessus de ses moyens en accumulant les dettes, c’est compromettre dangereusement l’avenir des générations actuelles et futures. Il est peut-être temps de prêter une oreille attentive à ceux qui, comme Serge LATOUCHE par exemple, sonnaient l’alerte et prédisaient les événements de ces jours-ci, depuis plusieurs années. Mais il faut le reconnaître, tout comme les préjugés, les habitudes ont la peau dure.

P. Eric Oloudé OKPEITCHA

samedi 21 janvier 2012

LE ROYAUME DE DIEU EST PRES DE NOUS


IIIe DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE B

COMMENTAIRE D’ENSEMBLE DES TEXTES

(Jon 3,1-5.10 / 1 Co 7, 29-31 / Mc 1, 14-20)

                                                          Photo. P. Eric OKPEITCHA

« Le temps est accompli et le Royaume de Dieu est tout proche : repentez-vous et croyez à l'Évangile » (Mc 1,15).



1. Dieu ne veut pas la mort du pécheur !

Le salut de Dieu offert dans l’amour est universel et n’exclut aucun peuple. Dieu Lui-même prit l’initiative de se révéler aux nations païennes à l’épiphanie. Le livret de Jonas, dont nous lisons un petit morceau en première lecture, est une belle fable qui porte en elle l’ironie d’un juif et de tout son peuple qui veut limiter l’offre de salut voire la présence de Dieu en un lieu. Il résiste et refuse d’obéir à la Parole de Dieu qui l’envoie à Ninive (nord de l’Irak actuel). En cette histoire que nous sommes invités à méditer, Dieu s’est montré le plus fort. Jonas se résout quelque peu à se détourner de sa mentalité politico-religieuse sectaire... Nous pourrions nous aussi être pris dans le piège d’une suffisance chrétienne qui procure tant d’illusions d’enferment sur nous-mêmes et nous empêche de voir, ce que Dieu fait dans la vie des autres et ce qui en nous détruit l’amour de Dieu ou nous en éloigne. Les richesses du Règne de Dieu sont disponibles à tous les peuples. Jonas prêche à Ninive la conversion (de l’hébreu shûb = retourner, se détourner de, renversement). Les ninivites se convertirent au Seigneur. Dieu ne veut pas la mort du pécheur mais qu’il se convertisse (Ez 18,23).

2. Qu’il se convertisse… !

Les menaces de destruction dont parle la première lecture peuvent être vues comme l’alarme de tous les dangers que nos péchés peuvent déclencher contre nous-mêmes et contre l’humanité : un cycle infernal de mort et d’autodestruction. Devant ce drame, Dieu se déploie comme amour qui sauve. Sa présence dans le monde inaugure un moment décisif pour l’avenir et toute l’histoire humaine : son Règne est la réalité nouvelle à laquelle nous devons communier en vue de notre libération des ténèbres sans cesse persistantes de ce monde. L’appel dramatique à la conversion est l’appel à comprendre que Dieu ne condamne personne. Il attend et veut de nous, un signe, un geste de retour à lui et de notre transformation dans la force de sa Parole : «Moi, je suis venu pour que les hommes aient la vie et qu'ils l'aient en surabondance » (Jn 10,10b). En Christ, Dieu fait don de cette vie nouvelle qui nous attend et dont nous avons un avant-goût ici-bas. Par ce qu’Il dit, ce qu’Il fait et ce qu’Il est, Il rend présent en nous et au milieu de nous son action permanente et éternelle de salut. Seul Dieu est le Seigneur qui donne sens et vie à l’humanité et à nous-mêmes. Voilà ce qui justifie l’appel à la conversion. Devant cet amour, nous ne pouvons plus continuer à vivre comme d’habitude. La conversion de chacun et de tous pour être vrai doit se vivre comme « un renversement de vapeur », pour faire de Dieu l’unique fondement de notre vie, suivant le Christ et se laissant former à son école comme les disciples ; une révolution intérieure qui sait que ce qui ne va pas dans le monde c’est l’homme lui-même.

3. Car la figure de ce monde passe… !


Paul motive en deuxième lecture cet appel à accueillir le Règne de Dieu. Par une formule solennelle d’invitation. L’humanité a atteint le seuil d’un monde nouveau, l’horizon de Dieu où plus rien ne doit nous distraire du Royaume de Dieu tout près de nous. Ce Royaume-là, est l’unique valeur digne de foi et de conquête. Et les phrases antithétiques (avoir/non avoir, pleurer/ jouir, acheter/non posséder, user/non user) soulignent l’urgence de purifier nos désirs et notre liberté pour comprendre que le monde matériel qui nous entoure n’a pas de valeur absolue. Ce texte est un chant d’apocalypse qui ne signifie pas alarmisme mais révélation du salut de Dieu qui germe en notre temps est limité. « A nous le temps n’est prêté que sous condition d’un retrait toujours possible »  (H. U. von Balthasar)
P. Chelbin Alfred Wanyinou HONVO


mercredi 18 janvier 2012

LA LEGERETE, UN DRAME DE L'HOMME CONTEMPORAIN



La nave Costa Crociere naufragata, 14 gennaio 2012
(ANSA/MAURIZIO DEGL ‘INNOCENTI
)

Vendredi 13 janvier 2012, alors que l’ombre de la dégradation des notes de 9 pays européens dont la France couvrait le monde des marchés, une autre tragédie commençait sur les côtes de l’île Giglio en Italie :  le naufrage - qui rappelle celui de  Titanic  un siècle plus tôt -  du navire de croisière Costa Concordia avec à son bord 3000 passagers et près de 1000 membres d’équipage. Il s’agit d’une petite ville flottante, un paradis terrestre sur la mer. Le décor et le luxe à l’intérieur contrastent nettement avec la grisaille qui caractérise la vie normale d’une façon générale. Seulement que pour ce vendredi, la nuit des rêves ne tarda pas à devenir celle des cauchemars.  Seraient mis en cause pour le moment, selon la presse, en attendant les conclusions de la justice,  la décision du commandant de bord à naviguer trop près de l’île[1] pour, semblerait-il, faire contempler la beauté de l’île aux touristes, contenter un membre d’équipage provenant de l’île, faire admirer le navire aux habitants de l’île, saluer un certain vétéran de la marine italienne vivant sur l’île et qui a déjà déclaré être absent au moment des faits, le manque d’alerte et d’appels au secours, son retrait hors du navire avant le dernier passager …Les prochains jours nous situeront davantage sur les vraies raisons. Mais ce qui est certain, c’est que la parade a tourné au vinaigre ; le navire a heurté un récif,  s’est brisé,  a pris de l’eau et a  commencé à s’enfoncer. Les survivants ont raconté leur cauchemar.

 Après la douleur pour les morts, les disparus, les blessés et la perte de ce joyaux avec tous les problèmes économiques collatéraux, l’opinion a été choquée par les premiers témoignages sur le comportement hallucinant du commandant Francesco S. Est alors paru un mot dans la presse italienne comme française,  celui de « légèreté » (leggerezza) qui nous a fait beaucoup réfléchir. A notre avis, c’est l’un des drames de l’homme contemporain, et pour cause.

Une observation de ce dernier dans son agir et même dans son être révèle souvent un touche-à-tout, vivant dans un univers d’appareils qui le sollicitent sans cesse, ne lui laissant aucun répit pour un quelconque approfondissement ou intériorisation. C’est aussi le type d’homme rebelle aux normes, voulant toujours faire comme bon lui semble, en quête perpétuelle de plaisirs, de  sensations, privé des ressources de la religion et, du coup, avec des ressorts internes fragiles. Il devient un homme léger et ne peut que produire des « légèretés » aux conséquences imprévisibles sinon dramatiques. Il semble alors que nous nous éloignons du temps d’un autre type d’homme, capable d’intériorité d’où il puisait les énergies qui le rendaient capables d’actes héroïques qui remplissent les annales de l’histoire. Un retour aux valeurs éthiques et religieuses, à une éducation non laxiste et conséquente,  est indispensable pour bâtir une civilisation d’hommes et de femmes dotés  d’une épaisseur humaine admirable qui soient capables d’écrire en lettres d’or et de noblesse,  par leur agir et leur être, l’histoire de notre temps.
P. Eric Oloudé OKPEITCHA.



[1] 150 m au lieu de 500, cf. Il Giornale, du 16/01/12 p. 3.

samedi 14 janvier 2012

PARLE SEIGNEUR TON SERVITEUR ECOUTE... !

                                IIe DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

COMMENTAIRE D’ENSEMBLE DES TEXTES

(I Sam 3,3b-10.19 / 1 Co 6, 13c-15a.17-20 / Jn 1, 35-42)

Le temps de Noel nous a permis de contempler la puissance du Verbe de Dieu manifestée en son Incarnation. Et tout particulièrement, l’Enfant-Dieu a été révélé aux nations païennes, faisant ainsi rayonner la gloire et la joie du salut sur l’humanité entière. Ce dimanche, Christ veut se révéler à chaque femme et à chaque homme d’aujourd’hui dans la force de sa Parole.

1.    Me voici Seigneur… !
Le jeune Samuel n’a pas encore l’expérience profonde de la Parole du Seigneur. Mais dans la disponibilité et la confiance il s’ouvre à la médiation sage et spirituelle du prêtre Eli qui a vite su discerner l’appel du Seigneur. Le rôle de ce prêtre a été celui d’un  simple instrument qui fit émerger Dieu dans le cœur et la vie de Samuel en vue du bonheur et de la libération du peuple de Dieu des nuits du péché dans lesquelles il s’est égaré loin de la face de YHWH. Tout comme Eli, Jean le Baptiste eut la même attitude vis-à-vis de ses deux disciples. Il a su leur transmettre, le désir du Christ, désir de son amour. André et cet autre disciple ont découvert le Messie Celui que leur ancien maître a toujours prêché et vers qui son ministère tendait de toutes ses forces. Le témoignage d’un ministre de Dieu, d’un parent ou de tout éducateur  part d’une parole qui enflamme toute vie pour la conduire à faire l’expérience personnelle de la communion avec Dieu. Quand le counseling ou l’accompagnement spirituel devient séduction (conduire à soi ) au lieu d’être éducation (conduire pour tirer dehors ce dont l’apprenant a au dedans de lui) il perd de sa valeur, s’affadit et devient un pur jeu humain où l’homme s’illusionne d’être son propre absolu. Toute œuvre éducative doit au contraire s’ouvrir sur l’absolu, sur le Tout Autre.
2.     Ils restèrent près de Jésus… !

La crise des vocations à la vie consacrée tout comme celle à la vie matrimoniale dont on parle tant, ne sont-elles en réalité déficit de cette lumière, manque de personnes comme Eli ou Jean-Baptiste capables de jouer ce rôle de médiation nécessaire à l’éclosion d’une connaissance approfondie et transformante de la vie ? Ce n’est d’abord pas question d’une somme de doctrines à connaître mais d’un profond désir du vivre-avec Christ. Chacun de nous a eu sur son chemin, un ami, un parent ou un éducateur dont L’Esprit-Saint s’est servi pour nous parler. Cependant aujourd’hui plus qu’hier, nous en avons besoin pour comprendre que quand nos paroles humaines deviennent témoignage de lumière du Christ c’est-à-dire pétries de la Parole de Dieu, elles produisent le désir de Dieu chez les autres et créent dans le cœur la culture de l’Amour, vraie reflet de l’image de Dieu en nos vies et dans l’histoire. Rester avec Christ donne sens à la vie et la change en source de joie. La rencontre avec Christ a tellement transformé André qu’il a amené son frère Simon à Jésus comme pour dire, « ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, ce que nos mains ont touché du Verbe de vie…nous en rendons témoignage et nous vous annonçons cette Vie…» (cf. 1Jn1,1-4) pour que Christ habite et demeure en vous.
                     3. Le corps est au Seigneur… !

A travers ces divers exemples, nous sommes appelés à être à notre tour, témoins de la rencontre avec Christ qui nous fait demeurer en Lui et donne à notre vie un nouvel horizon d’être. Notre corps est le premier lieu privilégié où demeure Christ, tente de sa rencontre et Temple du Seigneur. A notre baptême, le corps est la première instance de notre configuration à Christ. Le péché contre le corps est péché contre le Christ parce qu’il rend opaque à l’écoute de la voix du Seigneur qui nous appelle.

                                                                P.  Chelbin Alfred Wanyinou HONVO







BARACK OBAMA, QUE RESTE-T-IL DU MYTHE ?



President Obama delivering his speech at the State Department. Photograph: Michael Reynolds/EPA  
Au soir du 4 novembre 2008, le monde entier retint son souffle face à l’inédit : Barack OBAMA, un afro-américain de 47 ans devient le 44ème président des Etats-Unis.  Le 20 janvier 2009, le couple Obama intègre la Maison Blanche. Inutile de préciser que cette élection a été saluée dans le monde entier ;  on avait l’impression de vivre une révolution à l’échelle mondiale,  l’inauguration d’une nouvelle  ère marquée par la paix et l’arrêt des guerres, la fin de l’unilatéralisme américain dont on connaît les conséquences fâcheuses de par le passé, la destruction des barrières raciales érigées entre les peuples…  Le jeune président américain, frais et beau, allure sportive, langue déliée, discours alléchant, avait tout pour plaire, pour séduire. Les africains tiraient de cette élection une légitime fierté. L’Obama-mania est allée galopante, créant prématurément le mythe Obama. Trois ans plus tard, nous retrouvons Barack Obama  au sommet du G20 à Cannes, un président des Etats-Unis sans pouvoir réel sur la crise financière qui secoue la zone euro  et menace l’économie mondiale,  un président des Etats-Unis   qui a perdu de sa fraîcheur et de  son clinquant physique,  (la barre des 50 ans est désormais dépassée)  et qui, visiblement, ne suscite plus grand enthousiasme sur le plan international. En quelques mois de pouvoir, beaucoup de choses se sont passées…

Ce changement  s’explique, à notre avis, par le trop grand espoir placé en lui par la communauté internationale. Après les guerres qui ont marqué le dernier mandat de son prédécesseur, beaucoup espéraient ouvrir une nouvelle page à l’échiquier mondial, celle de la paix oubliant qu’il n’est que le président des Etats-Unis, élu pour défendre d’abord et avant tout, les intérêts américains. Ensuite, le contexte économique mondial n’a pas facilité la tâche au président Obama. Les crises économique et financière  ont  profondément marqué son mandat, des crises dont il n’avait pas  tous les leviers.  S’il a pu arrêter finalement la guerre d’Irak avec le bilan que nous connaissons, il a été obligé de poursuivre celle d’Afghanistan, augmentant le nombre de soldats américains à quelques jours de sa désignation comme prix Nobel de la paix en octobre 2009. Le fameux discours du Caire qui laissait présager une main tendue au monde musulman n’a pas tellement modifié la situation du Moyen-Orient où le processus de paix israélo-palestinien n’a pas connu d’avancées notables.  A tous ces événements, il faut  ajouter la vague du printemps arabe qui a surpris les occidentaux, mouvement dans lequel les pays occidentaux ont dû tourner le dos aux dictatures qu’ils supportaient hier, leur préférant la rue au visage inconnu.

Par ailleurs, plusieurs africains sont restés déçus par l’appui des Etats-Unis au retour de la France en Afrique, lors de la crise ivoirienne et surtout lors de la guerre en Libye qui a abouti à la mort du colonel Kadhafi. Les africains auront finalement compris que, malgré ses origines africaines, Barack  Obama  « n’est que » le président des Etats-Unis. En réalité, la politique a sa logique qui, après avoir laminé le mythe, l’a redimensionné pour ne laisser subsister que le  simple homme politique. Ceci dit, les jeunes africains peuvent s’inspirer de la ténacité dans le travail de cet aîné. Certains prévoyaient qu’il n’irait pas au bout du mandat, d’autres rêvaient d’une gestion calamiteuse émaillée de scandales de tous ordres. Mais les faits sont là pour prouver le contraire ; un mandat marqué par des succès certes mais aussi par des reculs, en somme le bilan d’un homme politique ordinaire.  

P. Eric Oloudé OKPEITCHA.




mardi 10 janvier 2012

LA GUERRE D'IRAK, QUEL BILAN ?

                                                                                               
                                                    Un soldat américain en Irak © Abacapress
Fidèle à sa promesse de campagne, le président Obama a mis fin à la guerre en Irak en ordonnant le retrait total des troupes américaines. Le 18 décembre 2011, les derniers soldats américains sont rentrés au pays, laissant un petit nombre chargé de la sécurité de l’ambassade des USA dans ce pays qui portera pendant longtemps encore les stigmates de la guerre et de plus de 8 ans d’occupation militaire. Quel bilan  tirer de cette expérience ? les objectifs fixés en 2003 ont-ils été atteints ?
Le 20 mars 2003, malgré l’opposition ouverte de certains pays comme la France, la Russie et la Chine qui menaçaient d’utiliser le droit de veto pour bloquer toute résolution de l’ONU portant intervention armée contre l'Irak, les Etats-Unis et leur allié, le Royaume-Uni décident unilatéralement d’attaquer l’Irak. Les vaillants soldats irakiens ont résisté mais que pouvaient-ils face aux  plus puissantes armées de la terre ? Le 1er mai 2003, sur un ton victorieux, le président George BUSH proclamait la fin de la guerre conventionnelle avec le sentiment prématuré de "mission accomplie". S’ouvraient alors 8 années d’occupation militaire au rythme des attentats et de guérilla. Plusieurs dignitaires du régime de Saddam ont été éliminés. Après un long procès, le dictateur déchu est condamné à mort pour les crimes contre l’humanité commis contre son propre peuple le 5 novembre 2006; le 29 décembre de la même année, il est pendu à l’aube. Dans l’incapacité de remettre de l’ordre dans le chaos installé, les Etats-Unis demandent que les autres pays envoient des troupes pour la sécurisation du territoire. On connait la suite…
Aujourd’hui, les américains laissent derrière eux un pays complètement détruit où règne l’insécurité. Les attentats sont devenus tellement fréquents qu’ils n’attirent plus l’attention de l’opinion internationale. Les rivalités entre les diverses composantes de la population (shiite et sunnite) sont ravivées. Les attaques contre les chrétiens revendiquées par les islamistes se multiplient. Apeurées ces populations chrétiennes se jettent sur la route de l’exil forcé. Les pertes en vies humaines sont très élevées. La démocratie qui devait remplacer la dictature peine à s’inscrire dans la réalité. Les armes de destruction massive détenues par Saddam Hussein n’ont jamais été brandies devant l’opinion ; les supposés liens de ce dernier avec les auteurs des attentats du 11 septembre 2001 restent à prouver. Alors qu’une grave crise de gouvernement menaçant le fragile équilibre politique pointe à l’horizon, les Etats-Unis se retirent, laissant les irakiens à leur sort.
En somme un guerre dont les mobiles se sont écroulés les uns après les autres ; une guerre débutée sans l’aval de l’Onu, une guerre qui aura semé la mort sans faire luire aucun espoir de vie. Une guerre dont on ne fera jamais le procès pour situer les responsabilités de ces milliers de vies humaines détruites, de ces générations de jeunes irakiens sacrifiés parce que n’ayant pas eu les conditions d’épanouissement humain, social et psychologique normal. Ils sont nés durant la guerre Iran-Irak, ils ont grandi durant les successives guerres du golf et parviennent à l’âge adulte sous l’occupation américaine. On ne parlera jamais assez des traumatismes psychologiques remarqués chez plusieurs soldats de retour au pays, désormais incapables de mener une vie normale à cause de l’horreur qu’ils ont vécues et dont les images sont gravées dans leur mémoire. Malheureusement l’histoire ne semble pas avoir compris la leçon. La guerre ne peut jamais constituer la solution. Dominique de Villepin martelant l’opposition de la France à une intervention armée contre l’Irak, disait justement en 2003, aux Américains qu’il est facile de gagner la guerre mais difficile de construire la paix. Les faits lui ont donné raison.
P. Eric Oloudé  OKPEITCHA     

samedi 7 janvier 2012

CHRIST, SAUVEUR DE TOUTE L’HUMANITÉ !


L’ÉPIPHANIE DU SEIGNEUR

COMMENTAIRE D’ENSEMBLE DES TEXTES

(Is 60, 1-6) /  Ep 3, 2-3a.5-6 / Mt 2, 1-12)
Dans le mystère de l’épiphanie Christ se révèle Sauveur de toute l’humanité, des païens comme des juifs, des pauvres comme des riches. Tous sont « associés au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse … » (Eph 3,6).

1.     Lumière et Gloire du monde !
Le retour d’Israël d’exil est encore loin d’être moment de paix et de bonheur. Le prophète y annonce la sollicitude du Seigneur, plein accomplissement de l’œuvre de Dieu qui malgré les temps difficiles fera de Jérusalem, lieu de sa lumière et de sa gloire. La lumière, signe de la présence et de l’action salvifique est symbole de la gloire de Dieu qui se manifeste. Cette épiphanie glorieuse provoque la procession de tous les peuples vers Jérusalem signe et symbole de vie de Dieu, de sa présence et de sa puissance. Jérusalem elle-même est appelée à recevoir son Sauveur, sa lumière pour s’ouvrir à l’universalité qui germe en elle. Un nouvel Israël est né. A l’Israël juif traditionnel, Dieu substitue l’« Israël de Dieu » qui en l’Enfant-Dieu, le Messie, accueille le don du salut et s’e laisse illuminer.
 
2.     L’expérience des Mages ! 
Cette Lumière de la rédemption est Christ qui brille dans le cœur de ceux qui se laissent guider par Lui et accueillent sa Parole. L’exclusivisme est vaincu. De l’orient, des païens sont venus révéler à Hérode, aux scribes et à tous, que le Sauveur est né en Judée. Ce paradoxe rythme la vie de Jésus jusqu’à sa mort. Par les uns Il est joyeusement accueilli, rejeté des autres souvent par les siens (Mt 13,57). Ceux qui l’ont accueilli, ont compris que les astres, les phénomènes naturels et autre merveille de la création « font, par analogie, contempler leur Auteur » (Sg 13,5) révélé en la personne du Messie. Ils se rendent disponibles à la grâce et le Seigneur fait d’eux instruments de joie et de vie du Christ pour le monde. Les Mages recoururent naturellement à Jérusalem capitale de la Judée et à ses chefs comme l’unique instance politico-religieuse et culturelle de référence dans la naissance du Seigneur. Mais ce n’est pas en grande ville mais dans la pauvre et simple bourgade de Bethlehem que Dieu se montre Dieu fort, Lumière des peuples et Roi d’Israël non pour discuter un quelconque pouvoir dont Hérode a tellement peur d’en perdre les rênes tuant parfois de ses propres fils pour en conserver l’hégémonie… Christ est au contraire, est Roi d’humilité, sans palais, sans armée dont la royauté est de servir le salut des hommes et des femmes leur restituant leur vraie dignité et liberté de fils de Dieu. Les saints Mages sont l’exemple de toute vraie conversion anthropologique : s’humilier dans toute recherche de vérité, s’ouvrir à la lumière et à la grâce divine pour accueillir l’ordre nouveau de l’évangile où il n’y a plus ni juifs ni grecs mais tous fils de Dieu.
3.     Tous ont part au même héritage !
Dans l’expérience des Mages, la recherche de la vérité qui s’élabore dans l’humilité devient désir d’absolu qui s’affermit dans la contemplation et l’adoration du Christ Verbe et Vérité. L’actualité de leur expérience pour nous, part de l’écoute et l’accueil de l’évangile qui seuls nous introduit dans le mystère du salut promis à tous. Christ est désormais Bien commun de toute l’humanité que le disciple  ou l’apôtre du Christ est appelé à rendre manifeste.
                                P.   Chelbin Alfred Wanyinou HONVO