lundi 20 décembre 2010

" Demain, vous verrez sa gloire"

" Ce soir, vous connaitrez votre Sauveur, car le Seigneur vient; demain, vous verrez sa gloire" (Ex 16, 6-7)
Que le Sauveur qui vient à nous illumine le soir de vos détresses, de vos tristesses, de vos difficultés de cette année 2010 qui s'achève pour que vous puissiez voir, se manifester concrètemment dans votre vie, sa gloire en termes de bénédictions, de paix, de joie et de prospérité tout au long de l'année nouvelle.
A tous et à chacun, bonne, heureuse et sainte année 2011.
Jésus Christ est Seigneur à la gloire de Dieu le Père, Amen.
Voir la video.

Noël, rumeur d’enfance au cœur de l’homme !



Noël, rumeur d’enfance au cœur de l’homme !

Devant le petit Enfant de Bethléem,

Laissons monter en nous la sève de l’innocence,


Laissons monter en nous la sève de la confiance totale en Dieu qui peut tout,


Et même se faire homme en naissant dans une étable.


Joyeux Noël à tous et à chacun !

Les vœux de fin d’année : pourquoi et comment ?



Le 12 janvier 2010, le monde entier est pris de cours et retient son souffle. Un tremblement de terre d’une magnitude de 7 sur l’échelle de Richter venait de frapper Haïti, l’un des pays les plus pauvres de la planète. L’ampleur des dégâts est impressionnante. Des centaines de milliers de victimes ensevelies sous les décombres, un nombre inimaginable de sans-abris, de blessés et d’orphelins. Il faut saluer, à ce propos, la spontanéité et la mobilisation de la communauté internationale pour sauver ce qui pouvait l’être encore et porter secours aux rescapés.

Et pourtant quelques jours auparavant, tous ces hommes, toutes ces femmes et tous ces enfants ont émis des vœux de paix, de santé et de bonheur pour la nouvelle année qui commençait et qui, en réalité, ne leur aura réservé, que 12 jours. Ces expériences combinées à d’autres vécues au niveau individuel poussent certains à s’insurger contre la pratique des présentations de vœux en fin d’année. « c’est du formalisme ! », « c’est inutile ! », « cela ne change rien ! », « vœux pieux et sans effet ! ». Toutes ces réflexions s’appuient sur les expériences dont nous avons parlé plus haut et qui, effectivement, heurtent l’esprit humain.

Mais pour notre part, nous pensons qu’il est essentiel de souhaiter les vœux à nos amis mais surtout à ceux avec qui nous ne nous entendons pas bien. Ce ne sont plus de simples vœux mais plutôt des prières. Or, tous, nous avons le devoir de prier en tant qu’enfant de Dieu et nous avons aussi tous besoin de la prière des autres. Les vœux, entendus dans ce sens, sont à présenter à tous. Ainsi, si tu veux présenter les vœux de paix et de bonheur aux autres, crois d’abord à la possibilité de la paix et du bonheur pour l’humanité, prie ensuite du plus profond de ton cœur pour la paix et le bonheur et enfin œuvre pour la paix et le bonheur sur notre terre.

En clair, commence par méditer, par croire à tes vœux, porte-les ensuite dans la prière et enfin, travaille dans ta vie à les inscrire dans la réalité. Si les milliards de vœux qui, bientôt, fuseront de toutes les parties du monde, étaient tous des prières faites avec foi et conviction, 2011 sera vraiment heureuse et sainte pour chacun et pour tous.

dimanche 19 décembre 2010

Trois leçons de la crise ivoirienne

La Côte d’Ivoire du grand président Houphouet Boigny n’a pas cessé d’alimenter la chronique de l’actualité mondiale depuis quelques années. Ambiances de guerre civile, divisions du pays en deux parties, rebellions armées, présence des troupes de l’ONU, reports répétés d’élection ou élections contestées et pour comble, l’affreux spectacle de deux présidents et de deux gouvernements… Ce tableau qui n’a rien d’original, puisque plusieurs pays l’ont aussi vécu à quelques nuances près, attriste tout africain épris de paix et de prospérité pour le continent tant il est vrai qu’il s’agit d’un pays autrefois havre de paix et de stabilité, terre d’accueil et d’immigration pour beaucoup de bras valides de l’Afrique de l’Ouest à la recherche d’un mieux-être. Loin de nous la prétention de désigner le coupable dans ce drame qui commence par trop durer et bien malin qui pourra en dessiner avec certitude l’issue. Seulement, nous voudrions esquisser quelques réflexions surtout pour la jeunesse africaine qui vit de près ou de loin cet événement qui doit devenir une expérience pour tous les africains.
Le pouvoir, service ponctuel à la Nation
La situation actuelle a commencé tout comme une banale querelle de succession. Après plusieurs décennies de pouvoir paternaliste sans partage, le grand président Houphouet Boigny a finalement pris le chemin de tout le monde. Ce coup d’arrêt fatal va créer une crise sans précédent dans un environnement où l’on ne connait pas le mot alternance et où l’on ne conçoit pas la réalité du pouvoir comme un service ponctuel à rendre à la Nation et puis à laisser à d’autres. Qui ne se laisserait pas tenter par le fauteuil moelleux et doré du président défunt ? Le résultat est là et inspire indignation. D’où la première leçon de cette crise, à savoir la conception du pouvoir politique comme un service ponctuel que l’on rend à sa Nation. Nous souhaitons vivement que la jeunesse africaine extirpe de son esprit la vieille conception du roi africain qui ne doit pas connaitre son successeur. Le monarque africain, exerçant et jouissant des honneurs du trône jusque dans la tombe doit mourir en chaque dirigeant africain et surtout dans la jeunesse africaine, l’élite de demain.
Jamais la guerre comme stratégie ou solution
La deuxième leçon de ce drame de la Côte d’Ivoire est le phénomène de la guerre à proscrire radicalement comme stratégie de conquête ou de maintien au pouvoir. La guerre, dit un ancien chef d’Etat africain, on sait quand ça commence mais jamais comment ça finira. Les artisans de premier ou de dernier ordre de la guerre en Côte d’Ivoire ne pourront jamais imaginer la fin de ce feu qu’ils ont allumé. Dans la situation actuelle, la réalité de la guerre a beaucoup joué. La contestation des résultats provenant d’une partie du territoire échappant au « pouvoir central », les soupçons mutuels et les rancœurs nés de la guerre rendent difficile l’acceptation des résultats définitifs. Dans un pays qui a connu la guerre, la confiance est détruite pour longtemps entre ses fils. Comme un feu mal éteint que rallume un léger vent, les uns et les autres sont à l’affût de quelque événement pouvant provoquer un retour au chaos de la guerre. Ce qui compromet le présent et surtout l’avenir du pays.
Prioriser le compromis
La troisième leçon est le rôle de la communauté internationale. Elle s’est déjà impliquée dans la résolution de conflits internes de plus pays du monde, mais en général, c’est seulement la volonté de compromis entre les fils et filles du pays qui a toujours fait poser la colombe de la paix. Et plus que jamais, cela se vérifie dans le cas actuel. Certains ont accusé la communauté internationale d’ingérence dans les affaires internes de la Côte d’Ivoire. A notre avis, c’est facile de sonner la trompette du nationalisme. Mais quand l’on sait l’investissement logistique, financier que fait la communauté internationale depuis le début des troubles jusqu’aux dernières élections, on pourrait comprendre son impatience pour un retour à la normalité surtout que d’autres fronts dans le monde sollicitent son soutien, que ce soit dans le domaine de la santé ou du développement. Aujourd’hui, nous avons deux présidents : l’un refuse de se plier à la volonté de la communauté internationale qui lui demande de remettre le pouvoir, l’autre est perçu par une partie de la population comme le symbole du diktat de la communauté internationale. Dans un cas comme dans l’autre, ce sont les Ivoiriens qui compromettent leur avenir. Car comment gouverner sereinement un pays en se mettant toute la communauté internationale à dos avec les mesures habituelles d’exclusion, de sanctions ciblées, de gel des avoirs… ? de l’autre côté, comment asseoir un pouvoir en vue de la reconstruction d’un pays quand l’on passe pour un président issu d’élections contestées à tort ou à raison, soutenu et imposé par la communauté internationale… ? C’est dire donc, que la solution se trouve une fois encore dans les mains des Ivoiriens qui doivent faire l’effort de dépasser leurs différends pour s’occuper de l’avenir de leur Nation et surtout du sort qu’ils réservent aux futures générations. Bientôt, on commencera à parler de la génération de la guerre.

Wikileaks, un monde sans secret (suite et fin)

Les responsables de wikileaks ont tenu promesse en publiant les documents annoncés. Le contenu de ces documents confidentiels a oscillé entre le banal et le sérieux, entre le « déjà su » et le « rien d’étonnant ». Il ne s’agit pas pour nous d’évaluer ici la portée ou de nous interroger sur le sens de cette publication. S’agit-il de l’application du droit à l’information ou de la liberté de la presse ? les documents publiés peuvent-ils être qualifiés d’information ? quel est l’objectif poursuivi par les responsables de wikileaks et où trouvent-ils les moyens ? De toute évidence, wikileaks ne saurait être l’œuvre d’une seule personne, c’est une entreprise qui emploie un personnel. Laissant de coté ces légitimes interrogations, nous voudrions poursuivre notre réflexion en examinant les conséquences possibles d’un monde sans secret. Nous voudrions aller dans ce sens parce que la tentative de remettre ou de maintenir l’ordre ancien ne nous parait pas promise au succès. Et cette tentative réside dans ce qu’ont tenté de faire les Etats-Unis en mettant sur pied un comité scientifique dont la mission est de bloquer le fameux site en y envoyant des tonnes de virus et de mieux protéger désormais les documents par un système plus sophistiqué. Mais la technique a toujours servi à détruire la technique, d’où la possibilité de contourner ou de déverrouiller ce qui serait verrouillé.
La superficialité des communications
Le monde sans secret dans lequel nous entrons, à petits pas, aura pour première conséquence la superficialité des communications faites à travers les nouveaux médias. A l’exception des naïfs, l’on sait désormais qu’il ne faut pas « tout » dire au téléphone encore moins « tout » écrire sur facebook ou par mails. En définitive, la fameuse « ère de la communication » ne sera pas l’ère de la croissance de l’humain dans l’homme grâce à une ample ouverture à ses semblables mais celle de la méfiance ou du repli sur soi.
Retour à la communication non médiatisée
La deuxième conséquence, qui découle de la première, sera le retour aux formes traditionnelles de communications, plus directes et non médiatisées dans le sens où aucun support techniques ne s’insère entre les communicants. Il est juste de faire remarquer que cette forme de communication ne met pas non plus à l’abri de tout risque de trahison ou de publication même à faible échelle de ce qui était destiné à la sphère privée. Mais nous prenons en compte la dimension « contact humain » qui apporte une valeur ajoutée à nos relations. Et en ce sens, cela pourrait être bénéfique pour l’homme qui redécouvrira la valeur et la richesse de l’autre et, par ricochet, de lui-même.
Sens de responsabilité et de vérité
La troisième conséquence pourrait être l’accroissement du sens de la responsabilité et de la vérité dans tout acte de communication. En d’autres termes, que le communicant évalue ou soit conscient de l’impact qu’aurait eu le contenu de sa communication mis sur la place publique. Paraphrasant Kant, nous dirions « communique de manière à ce que le contenu de ta communication puisse être diffusé sans préjudice par les médias du monde entier. » L’application de cette maxime pourrait réduire l’opacité du « monde invisible » et l’hypocrisie des divers pouvoirs ou groupes de pression.

samedi 18 décembre 2010

Sur les pas de Joseph

QUATRIÈME DIMANCHE DE L’AVENT (Année Liturgique A)
(Is 7,10-14 / Rm 1,1-7 / Mt 1,18-24)

Les fiançailles en Palestine ancienne au temps du Nouveau Testament était un moment où, bien que ne vivant pas encore ensemble, les fiancés étaient juridiquement liés (Dt 20,7 et 22,23-27) et pour cela, considérés épouse et époux. L’infidélité de la fiancée était vue comme un adultère et au cas où venait à décéder le fiancé, elle devenait veuve. Pendant cette période (eruzin = fiançailles), sont prohibés les rapports intimes surtout dans la région de la Galilée où sévissait une morale très rigide par rapport à la Judée. Tel est en bref, le milieu où Joseph et Marie vivaient leurs fiançailles quand soudain, la maternité s’est manifestée en la jeune future épouse. Quel drame ! Que faut-il faire ? Que faut-il dire ?
Joseph, homme juste et homme de Dieu !
Joseph, pouvait-il la répudier secrètement sans acte juridique
(et donc sans témoins) ? ou s’était-il déjà rendu compte que Dieu avait un projet sacré sur la femme ? Toutes questions possibles ! Mais dans un sens comme dans l’autre, nous sommes en un contexte judaïque galiléen où il n’était pas facile de divorcer sans que les gens le sachent. S’il était possible de le faire, il ne serait pas non plus impossible de considérer que dans un village comme Nazareth, la contiguïté des cases était en faveur de la rapide diffusion des informations et de tout commérage. De toutes les manières, la situation se complique pour Joseph. Le drame atteint son sommet quand subitement l’ange lui apparaît comme en tout récit d’annonciation : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie… » (Mt 1,20). Dans l’expression « prendre chez toi Marie», est signifiée la deuxième et dernière étape de tout mariage juif : l’entrée solennelle de l’épouse chez l’époux (Nissuin=introduction). Dieu invite ainsi l’homme à prendre chez lui non plus seulement Marie son épouse, mais aussi l’Enfant-Dieu à naître. C’est l’appel à prendre conscience de la confiance que Dieu nous fait pour qu’à notre tour, nous puissions avoir confiance en Dieu. Le lecteur devine qu’en tout cela, l’évangéliste met en relief l’être-juste de Joseph et l’ouverture à la grâce qu’ implique sa justice. Il reçoit de Dieu l’indication sur le mystère à venir. Sans bien savoir où la route conduit, il l’accueille sans cesser d’être pleinement homme ou mieux, sans que sa raison capitule. L’exhortation « ne crains pas !» fait voir le degré du drame et dans le même temps procure sécurité à Joseph devant le mystère de Dieu qui dépasse tout entendement humain et au cœur duquel l’homme se perd.
Achaz, homme d’une religiosité sans foi !
Joseph fait confiance et entre dans le projet de Dieu. Le roi Achaz au contraire se ferme à l’initiative divine de protéger le royaume et d’y manifester sa gloire. En effet, devant le péril de la guerre Syro-Ephraimite qui mettait à haut risque Jérusalem et tout le royaume de Judée, Le roi refuse de demander un signe sous prétexte de ne pas tenter Dieu ou de forcer sa volonté. Là s’exprime en réalité, une prétendue religiosité ou respect de Dieu qui cache un manque de foi. C’est à Dieu lui-même qu’Achaz fermait la porte. Mais Dieu est plus grand que le cœur de l’homme. Son Amour se manifeste malgré notre refus car c’est lui qui le premier nous aima. (1 Jn 4,10). Le signe de cet Amour est la promesse de la venue du Messie, l’Enfant-Dieu, signe que Dieu chemine avec l’homme pour le salut. Dieu veut demeurer en nous et faire de nos vies et de chez nous, chez Lui.

Qui est cet Enfant ?
Mathieu nous permet ainsi de méditer le mystère de l’origine divine de l’Enfant-Jésus, l’Enfant-Dieu : « ..ce qui a été engendré en elle (Marie) vient de l'Esprit Saint, et elle enfantera un fils auquel tu donneras le nom de Jésus, car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés » (Mt 1,20-21). Cet Enfant est l’Emmanuel, Dieu-avec-nous annoncé à Achaz, le « Dieu qui sauve des péchés » annoncé à Joseph. Ce mystère d’un Dieu-fait-homme au milieu des hommes est le signe de notre victoire sur le mal et sur les ennemis, signe que Dieu est à l’œuvre dans l’histoire pour la porter à son accomplissement. Cet accomplissement est l’annonce joyeuse et heureuse de notre salut récapitulée en la personne de l’Enfant-Dieu, Jésus-Christ. En sa personne cette Bonne Nouvelle de salut dont Paul se proclame l’heureux serviteur, atteint sa plénitude (Rm 1,1-3). L’action de l’Esprit donne vie à une nouvelle humanité dans le Christ. Dans notre vie et dans notre monde est entré Jésus pour que nous entrions à notre tour, dans la vie et le monde de Dieu.
L’annonce joyeuse de notre être-avec-Dieu
Au-delà d’une simple narration de ce qui s’est passé, les textes d’aujourd’hui nous portent à contempler en un premier temps, l’humilité de Dieu qui entre en notre chair mortelle, l’assume, la réhabilite pour l’élever en dignité ; et en un deuxième temps, l’appel de l’homme à collaborer à ce projet de salut. Somme toute, une fois transformée en Dieu et élevée, notre vie devient protagoniste de cette merveille de la présence vivante de Dieu. Protagonistes, nous pouvons l’être imitant le silence priant de Joseph. Nous pouvons le devenir imitant le zèle priant de Paul, annonciateur de l’évangile du salut, Jésus le Christ. En ces deux figures, nous écoutons la voix de l’Esprit qui nous dit : « puis-Je compter sur toi ?» Par notre foi, nous sommes sûrs qu’il vaut mieux compter sur Dieu mais Dieu peut-Il à son tour compter sur nous ? Joseph s’offre à nous comme un exemple d’humanité ouverte à Dieu. En lui s’est réalisée pour nous la parole de Dieu : « L’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu» (Dt 8,3 ; Mt 4,4). Cette parole qui sort de la bouche de Dieu, c’est bien le Verbe du Père, Jésus le Christ.
Quelles sont en notre vie les situations à travers lesquelles l’Esprit Saint nous invite à nous abandonner comme Joseph à Dieu et à sa volonté ?

Père Chelbin-Alfred Wanyinou HONVO, Bibliste.

samedi 11 décembre 2010

Dimanche 12 décembre 2010. 3ème dimanche de l'Avent. Jean Baptiste: l' éternel missionnaire

L’histoire antique rapportée par Flavius Josephus (BJ VII, 6, 2-3) et les fouilles archéologiques de ces dernières décennies, attestent que Jean Baptiste était détenu prisonnier dans la forteresse de Machaerus à l’est de la mer morte, pendant presque toute la durée du ministère de Jésus en Galilée. L’épreuve de la prison que vivait cet homme habitué de la liberté des déserts (Lc 1,80), finissait certainement par lui faire poser des questions ou peut-être même douter à cause de ce qu’il entendait dire du Christ et de ses œuvres. Lui Jean, avait annoncé un Messie qui écraserait les ennemis, un Messie libérateur et glorieux. Mais à présent, il entend parler d’un Messie miséricordieux et plein de bonté envers tous. C’est déjà-là, la preuve que quelquefois, les signes de la présence parmi nous du Règne de Dieu ne nous sont pas perceptibles, non pas d’abord à cause de notre manque de foi mais surtout parce que nous voulons voir Dieu dans les grandeurs mondaines, les apparats de noblesse. Nous nous faisons l’image – comme le Baptiste – de l’avènement d’un Messie humainement fort et terrifiant, qui va «nettoyer son aire», et « consumer au feu qui ne s’éteint pas » (Mt 3,12). Pour mieux comprendre, Jean envoie ses disciples s’enquérir de la vérité auprès de Jésus : « es-tu Celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre» ?
Es-tu Celui qui doit venir ?
Cette question communément interprétée comme expression du doute de Jean lui-même, pourrait bien aussi traduire le doute de ses disciples qu’il envoie écouter le Christ en personne afin de se convaincre eux-mêmes de son identité messianique. Dans un cas comme dans l’autre, on découvre en Jean, la figure d’un éternel missionnaire et infatigable chercheur de Dieu. Il vit pour Dieu, tant au désert que dans la souffrance de la prison. C’est l’exemple de celui qui s’engage totalement pour Dieu. Son doute est fondé sur la logique de l’attente de la fin, logique du jugement dernier qu’il a toujours prêché et qui contraste avec la figure d’un Messie doux et bienveillant dont il entend maintenant parler. Jésus ne vient ni comme un juge, ni comme un chef de guerre combattant contre les multiples violences subies par son peuple. Plus qu’un simple doute du Baptiste, il s’agit d’y voir une foi qui est toujours à la recherche de son intelligibilité, quête de vie profonde en Jésus-Christ et dans le même temps, humilité pour accueillir le Messie, non selon ses idées préconçues et préétablies, mais selon que Dieu se donne à voir et à comprendre. Pour connaître Dieu, il faut interroger Dieu lui-même. Mieux, pour parvenir à la connaissance de Dieu il faut la médiation du Christ.
Les œuvres révèlent l’identité du Christ
Jésus répond aux disciples de Jean en les renvoyant à ses œuvres. Il se sert des paroles d’Isaïe 35,5-6 (ou aussi Is 61,1) lues en première lecture. « Allez rapporter à Jean ce que vous entendez et ce que vous voyez : les aveugles voient et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent…» Plus que cela, « la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres » (Mt 11,5-6). Ce sont les actions ou les œuvres (miracles et évangile) qui révèlent l’identité du Messie. Cette réponse de Jésus totalise six verbes d’action qu’on pourrait aussi symboliquement comparer avec les six jours de la création. Ce sont des verbes qui traduisent la vie, la vie que Dieu nous donne. Ces actions sont la preuve de la vérité de la personne du Christ. N’est-ce pas aux fruits qu’on reconnaît l’arbre ?(cf. Mt 7,20) Notons bien cette méthode de Jésus : laisser les œuvres révéler notre identité. Cela vaut autant pour les chrétiens que nous sommes. C’est notre témoignage qui donnera crédibilité à notre profession et notre vie de foi. Peut-être verra-t-on là aussi, l’illustration d’une autre parole de Jésus : « tout arbre qui ne produit pas de bons fruits est coupé et jeté au feu » (Mt 7,19). Mais seuls, les miracles ne suffisent pas. Le couronnement des œuvres du Christ, c’est la proclamation de l’Évangile. La Bonne Nouvelle annoncée à tous et singulièrement aux pauvres est source de bonheur et de joie, source de notre re - création permanente. Elle est la force qui transforme l’humanité, lui confère liberté et lui fait retrouver sa dignité première. Jésus-Christ lui-même est cet Évangile en personne, Bonne Nouvelle du salut. « Heureux qui ne se scandalise pas à cause de moi ! » (Mt 11,6) Jean et ses disciples et nous avec, devront faire de nos doutes, des portes ouvertes pour une nouvelle découverte de qui est véritablement Jésus-Christ, le Sauveur qui vient. Il n’est pas une idée abstraite, une légende entretenue le long des âges mais une personne vivante, agissante en nos vies. C’est cela l’annonce de joie de ce troisième dimanche de l’Avent : Réjouissez-vous (Gaudete) car Il vient…Il est là!
Notre vraie Joie est la rencontre avec le Christ
Notre première lecture nous porte au cœur de la joie que la venue du Messie nous procure. Le projet de Dieu pour l’humanité, et spécialement pour les chrétiens, est un projet de libération et de joie car le Royaume de Dieu est là tout près de nous. Ce Royaume est maintenant indiqué en la personne de Jésus-Christ, le Sauveur. L’avènement du jour du Sauveur, est un événement qui retentit et fait exulter toute la création. Si dimanche dernier le Seigneur nous a rassuré que le désert fleurira par sa puissance, aujourd’hui, le désert est invité à la joie. Pourquoi une telle Joie ? parce que la Parole de Dieu est le lieu où toute existence humaine est régénérée et transformée, lieu de notre re-création. Par la force du Verbe, les aveugles voient, les sourds entendent, l’espérance renaît en nos cœurs… En s’adressant à la foule, Jésus fait des précisions utiles sur Jean et sur lui-même. Jean est son véritable précurseur. Sa vie, qu’il a su positionner loin de toute séduction et illusion mondaines, est de totale fidélité à Dieu, exemple de transparence qui a donné crédibilité à son oeuvre prophétique. Les foules allaient à Jean parce qu’elles désiraient faire renaître l’espérance morte en leur cœur. Mais en Jésus, il y a plus que Jean.
En Jésus, toutes les promesses messianiques jadis annoncées dans la loi, les écrits et les prophètes, sont accomplies. Un monde nouveau fait de nouvelles relations avec Dieu, naît. Seule la conscience permanente à vivre cette nouveauté déjà dans le présent, sauvera l’humanité de faux paradis terrestres et de toutes forces de la nuit et de nuisance. L’exhortation de l’apôtre Jacques lue en deuxième lecture insiste sur la patience dans l’attente de l’avènement du Sauveur et la patience dans les épreuves comme une vertu de la foi. L’agriculteur et le prophète ont en commun la foi dans le futur de Dieu, la foi que la dernière parole reviendra à Dieu. Leur attitude que nous avons d’ailleurs découverte chez le Baptiste, est une invitation à ouvrir notre âme et notre raison à Dieu.

Père Chelbin Alfred Wanyinou HONVO, bibliste.

Dimanche 5 décembre 2010. Urgence de la conversion

A quelque différence près, l’Évangile de ce deuxième dimanche de l’Avent revient, comme celui du dimanche dernier, sur les accents menaçants des « fins dernières »: le royaume de Dieu est proche, préparez-vous en vue d’échapper à « la colère prochaine ». Ces diverses images appartiennent en réalité à un mode pittoresque d’expression des prophètes et/ou des évangélistes (cf. par exemple la littérature apocalyptique de Daniel). Ils essaient ainsi de créer une tension vive en vue d’affirmer l’imminence du Règne de Dieu (en réalité déjà inauguré et déjà-là), et conduire l’homme à la pleine connaissance de Dieu à travers les exigences fondamentales de l’Évangile. La mission du Baptiste peut se comprendre dans ce cadre-là.

La mission de Jean Baptiste…

L’activité prophétique de Jean le Baptiste est toute orientée vers le Christ, « Celui qui doit venir ». Dernier de la longue lignée des prophètes annonciateurs du Messie, il nous est connu comme le précurseur du Christ, « celui qui prépare la voie…». C’est l’une des figures sublimes de l’humilité dans les Écritures : il s’efface devant le Christ, Celui dont il n’est pas « digne de dénouer la courroie des sandales » (Mt 3,11). Mais Jean se trouve dans la continuité de l’Ancienne Alliance : Isaïe en sa prophétie (Is 40,3) le présentait comme « la voix de celui qui crie… ». Aussi, le portrait physique de Jean ressemble à celui d’Elie (2 Rois 1,8) : «…vêtement fait de poils de chameau et un pagne de peau autour de ses reins ; sa nourriture était de sauterelles et de miel sauvage.» (Mt 3,4). Par là, Mathieu signale l’identité prophétique de Jean comme le nouvel Elie devant préparer les jours messianiques (Mt 11,14). Ces éléments sont l’authentification de la mission du Baptiste. Son activité s’inscrit dans l’accomplissement du règne de Dieu. D’une part, personne ne s’envoie et personne ne s’improvise prophète. On est envoyé en mission parce qu’on la reçoit de Dieu, une mission prophétique légitimement identifiable dans une généalogie sacrée de prophètes et vérifiable au double point de vue historique et théologique. Nous pouvons aussi lire d’autre part, en ce caractère ascétique de Jean, sa dynamique d’être et de vivre déjà dans l’Esprit du Christ qui vient. A son école, le chrétien peut vivre cette tension permanente, une vigilance (au sens de veiller dans le Seigneur) à opérer des choix éthiquement corrects en vue du Règne de Dieu. C’est tout cela sauf une simple et banale tentative piétiste de mortification. L’esprit de nos différents exercices d’ascèse et de mortification n’est-il pas avant tout d’indiquer que Jésus nous appelle à le suivre non simplement comme un personnage fameux, modèle à admirer ou à copier, mais comme une croix à prendre et à porter (imitation du Christ) ?

Urgence de Conversion

Le contenu de sa prédication est toute simple mais dense : « convertissez-vous, car le Royaume des Cieux est tout proche.» Nous retrouvons cette même proposition impérative chez Jésus quand il inaugure sa mission publique (Mt 4,17 ). L’expression « Royaume des cieux » peut bien traduire l’universalité de la Seigneurie de Dieu. Ce pouvoir universel est le salut que Dieu inaugure pour son peuple. Ce salut se révèle maintenant tout proche de nous. Dieu est fidèle en sa promesse et l’évangéliste en donne les preuves en citant Isaïe. À l’initiative de Dieu devra correspondre notre réponse. Cette réponse humaine est un programme de conversion (étym. metanoia = changement (renversement, retournement) d’esprit, de cœur), de renversement intérieur des résistances de notre ego à la grâce. Le prophète s’illustre ici, celui qui est spirituellement capable de lire même dans les cœurs et les pensées de ces concitoyens : « engeance de vipères, qui vous a suggéré d'échapper à la Colère prochaine ?…ne vous avisez pas de dire en vous-mêmes : "Nous avons pour père Abraham." Car je vous le dis, Dieu peut, des pierres que voici, faire surgir des enfants à Abraham» (Mt 3,7.9). Personne ne peut se prévaloir d’être ou d’avoir de privilèges que d’autres devant le Seigneur. Tous doivent se conformer à l’urgence de pénitence, de changement de vie en vue du Règne. Au sacrement de baptême qui nous configure au Christ, doit suivre la conversion quotidienne intérieure, passage du vieil homme à l’homme nouveau inauguré en Jésus-Christ. Baptême et confession des péchés vont de pair et font entrer le Christ dans l’âme et la vie du croyant. L’une des dimensions de la grâce de l’incarnation historique du Verbe (logos), c’est la naissance du Christ dans le cœur de l’homme qui l’accueille. C’est un parallèle significatif. Le Christ fait irruption dans nos vies ou, le Règne de Dieu est proche de nous si et seulement si nous acceptons d’opérer ce changement radical dans notre relation avec Dieu. On reconnaît l’arbre à ses fruits.



Fruits de conversion

En réalité, les invectives de Jean contre les pharisiens et les sadducéens portaient surtout à dénoncer leur tendance à recevoir le baptême avec un esprit insincère, sans une volonté vraie de conversion. Le Baptiste n’arrêtait pas de le dire haut et fort : «…produisez des fruits dignes du repentir ». Autrement dit, donnez la preuve que vous êtes convertis. Et nous pouvons nous poser la question : quels sont ces fruits de conversion? Mathieu n’en donne aucun détail. Chez Luc au contraire, c’est un tableau de pratiques qui est dressé (Lc 3,10-14), répondant ainsi à la question « que devons-nous faire ? » Mathieu va au-delà de simples pratiques à observer. Et plus qu’une question du « faire », c’est une orientation nouvelle de vie. L’Évangile n’est pas d’abord un ensemble de « choses à faire », un ensemble d’observances religieuses. Cela vaut pour nous aussi aujourd’hui. L’Évangile est d’abord la foi en Jésus crucifié et ressuscité. Mathieu a certainement vu que la recherche de pratiques rigoureuses à accomplir, expose les croyants à un pharisaïsme dangereux et au risque du piétisme. Celui ou celle qui se convertit est comme un arbre dont les racines plongées en Dieu, produisent de bons fruits. Les fruits de la conversion sont donc la vie en Christ par la prière, la réconciliation, la justice et l’amour (Lc 3,10-14).
Les lieux du ministère du Baptiste sont à ce propos significatifs. Désert et Jourdain évoquent l’Amour de Dieu pour Israël. Le désert plus que tout, nous convoque au détachement, au silence. Son trait d’aridité nous signale aussi l’urgence d’une vie intense de prière pour comprendre que la foi est un de don de Dieu qu’il faut cependant, tous les jours demander et humblement conquérir par la prière. C’est la foi qui fait « refleurir le désert » et fait revivre l’arbre mort.

Ce sauveur qui fait refleurir le désert

L’élément fondamental qui dans les textes de ce dimanche pointe, est la figure ou la nature de ce sauveur qui vient, pas seulement à Noël et dans les sacrements que nous recevons tous les jours mais, qui vient « à l’accomplissement des temps ». Qui est ce Messie qui vient au « jugement final » ? « au dernier jour » ? Qui est ce Sauveur qui vient au jour de « la colère…» ou à l’avènement du Jour du salut ?
Plus haut, Jean Baptiste le présentait comme celui qui baptisera dans l’Esprit et le feu. Pour Paul en deuxième lecture, il est le serviteur qui a uni les peuples en vue du même salut. Et dans la première lecture, deux symbolismes frappent le lecteur d’Isaïe : un symbolisme relatif au règne végétal et un symbolisme relatif au règne animal. Par ces deux figures, le prophète annonce une humanité réconciliée et rénovée, une nouvelle création dont « le surgeon qui pousse des racines de Jessé » est le protagoniste. En réalité, la dynastie davidique anéantie et déclarée morte par les forces ennemies, reprend force ; les infidélités et péchés de cette dynastie n’ont pas eu le dessus. YHWH (Dieu) a eu le dessus. Et, en la personne du Messie se réalise et se manifeste la nouveauté de Dieu. La nouvelle création renaît sous le signe d’une humanité réconciliée et mise en harmonie. Grâce à l’Esprit de connaissance de Dieu, l’ordre de la création est rétabli. Les tensions entre raison et instinct, intelligence et émotion, désir et agir sont mises en harmonie. Le désert refleurit. L’arbre mort porte du fruit. C’est l’œuvre de ce Sauveur qui vient.
Dans l’humilité de Jean-Baptiste, redécouvrons la flamme vive de la connaissance de Dieu et notre vie renaîtra de ses cendres. Repartons du Christ pour produire les fruits de notre conversion.

Père Chelbin Alfred Wanyinou HONVO, Bibliste.