samedi 27 août 2011

NOTRE MODÈLE, C’EST LA CROIX NON LE MONDE PRÉSENT … !

XXII DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE (A)
COMMENTAIRE D’ENSEMBLE DES TEXTES
(Jr 20, 7-9 / Rm 12, 1-2 / Mt 16, 21-27 )


Le monde présent peine à accepter le langage chrétien de la croix. Et pourtant, de ce mystère de la croix jaillit pour tous chrétiens ou non, la vraie vie, la vraie joie qui transforme et recrée l’humanité dans l’amour qui seul peut lui procurer la paix.

1. Le disciple ou le chrétien à l’épreuve de la croix !

Les confessions intimes de Jérémie nous présentent le prix à payer de notre être- chrétien, une mission difficile à dire la vérité, dénoncer la violence et toutes autres structures de péché dans lesquelles nos frères et sœurs sont tenus. C’est dur pour le prophète comme pour nous d’affronter sans cesse l’impopularité, la souffrance, le danger d’être lynchés, tués. Il nous vient le désir de renier le Seigneur, de fuir… Mais fuir Dieu en ces heures d’épreuve ou de découragement, heure de croix, c’est l’empêcher d’entretenir en nous sa puissance qui nous fait vivre au-delà de cette vie de passage. La souffrance inhérente à notre vocation est orientée vers la joie de la résurrection.

2. Le scandale du mystère de la Croix !

Pierre qui dans sa petitesse avait accueilli la révélation du Père sur l’identité du Christ pour ensuite la professer, peine à accepter un Messie crucifié. Il pense comme nous tous. Il n’accepte pas un Christ souffrant. Jésus lui révèle sa vraie messianité : un Messie-souffrant dont le trône de gloire et de Roi sera la croix. En Lui qui était désigné « Pierre », Jésus détecte les mêmes paroles par lesquelles Satan l’avait tenté au désert. (Mt 4,1). S’il n’y prend garde, Pierre peut devenir pierre d’achoppement. « Tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes.» De bonne foi, Pierre ne veut pas le mal pour son Seigneur mais ce faisant, il réduit le salut à un bien-être ou une simple guérison humaine. Descendant dans l’abîme de la souffrance, Christ veut nous ouvrir les yeux et l’esprit sur la vraie joie, ce qui est et qui fait la vraie gloire.

3. Ne prenez pas pour modèle le monde présent !

Il y a deux manières de suivre le Christ :

- « se renier soi-même »

L’évangile de Mathieu (26,34) emploie le même verbe dans le cas du reniement de Pierre (verbe grec aparnéomai). Se renier peut donc être compris comme un renoncement aux fausses illusions en notre moi, un refus d’obéir à la fausseté quelquefois présente en notre ego et toutes autres déformations du Vrai, du Beau et du Bien pour laisser Dieu parler et vouloir en nous et faire émerger sa Parole de vie en nos vies.

- « prendre sa croix »

En cette Parole de vie, nous découvrons que la croix nous convoque à vaincre l’orgueil et la peur pour être véritablement nous-mêmes, forts de notre dignité humaine et forts de la victoire du Christ pour affronter le mal en nous et autour de nous. Cela ne sera possible que si nous faisons place à Christ, ne refusant pas comme Pierre la souffrance du Messie. Porter ou accepter la souffrance du Christ, c’est aussi s’opposer aux pulsions mauvaises qui en nous, font rechercher toutes facilités et tous modèles artificiels de succès rapides, de gain facile et sans effort, de plaisirs immédiats que le monde actuel des intérêts politique et économique, des TV people et gossip d’aujourd’hui se font tristement les chantres. Ainsi on comprend plus aisément que l’homme n’est pas patron de sa vie, et seule à la Lumière de la croix nous voyons la lumière qui illumine notre vie pour dire oui au scandale et à la puissance de la croix. De là seulement rayonne la vérité et le triomphe du Christ dans le monde et pour la vie du monde. « La croix du Christ donne beaucoup plus que ce qu’elle exige. Elle donne tout, car elle nous conduit à Dieu. » (Benoît XVI JMJ 2011). Les déserteurs de la croix n’appartiennent pas au Christ.


P. Chelbin Alfred Wanyinou HONVO, bibliste.

dimanche 21 août 2011

SPLENDIDES JOURNEES MONDIALES DE LA JEUNESSE !


Ces Journées Mondiales de la Jeunesse se passent « splendidement bien et le pape en est pleinement satisfait » : c’est en ces termes que le P. Federico Lombardi, directeur de la Salle de presse du Saint-Siège, sur Radio Vatican, faisait un bilan partiel des JMJ de Madrid dans l’après-midi du samedi 20 aout 2011. Préparées avec minutie et une mise à contribution des nouveaux médias, on pourrait dire sans complaisance que les fruits ont tenu la promesse des fleurs. Les manifestations contre l’événement relayées par une certaine presse n’auraient entamé en rien la beauté et la splendeur desdites journées. Malgré les effets de la crise sur les vacances en Europe cette année, 2. 000 000 de jeunes à la veillée du samedi soir, 12 000 volontaires, 14 000 prêtres, 800 évêques… autant de chiffres qui parlent d’eux-mêmes. Les jeunes étaient là autour du Christ, avec le Pape et toute l’Eglise qui priait pour eux.


Leur enthousiasme, leur endurance à toute épreuve que ni la canicule (41°), ni la pluie et le vent qui a interrompu la veillée jusqu’au moment où le Pape devait prendre la parole, ni les conditions exceptionnelles et pas toujours commodes des rassemblements du genre, n’ont pu émousser est un signe éloquent qui devait convaincre de l’énorme potentialité des jeunes quand on sait les mobiliser autour du Bien, du Beau et du Vrai. « Merci pour votre joie et votre résistance », a dit Benoît XVI quand il a repris la parole après la pause imposée par les caprices du temps.

Il faut souligner que, contrairement aux clichés, Benoit XVI est parfaitement entré en « communication » avec les jeunes. Du confessionnal où il a reçu lui-même 4 jeunes pour le sacrement de la réconciliation, aux multiples occasions où dérangeant le protocole et les services de sécurité, les jeunes l’ont approché pour lui dire un mot, le toucher, en passant par le déjeuner simple avec 12 jeunes ( 2 pour chaque continent et 2 pour l’Espagne) tirés au sort et l’aventure ensemble sous la pluie et les vents, Benoit XVI aura marqué « sa » jeunesse qui était fière de l’applaudir et de scander « ici, c’est la jeunesse du pape ! ». Il fallait voir le Pape leur dire avec émotion et proximité, après la veillée : « Chers jeunes, nous avons vécu une aventure ensemble... Avant de partir, je voudrais vous souhaiter une bonne nuit à tous. Reposez-vous bien. Merci pour le sacrifice que vous êtes en train de faire. Je suis certain que vous l'offrirez généreusement au Seigneur. Nous nous verrons demain, si Dieu le veut. Je vous remercie pour le merveilleux exemple que vous avez donné. Comme ce soir, avec le Christ vous pouvez toujours affronter les épreuves de la vie. Ne l'oubliez pas. Merci à tous », a conclu Benoît XVI. Après le déjeuner, Aurora María Almagro, Espagnole de 21 ans de Murcie commente « Le pape a tout fait pour nous mettre à l'aise ».

Quelques paroles fortes de Benoit XVI à l’adresse des jeunes à Madrid :

« Chers amis, qu’aucune adversité ne vous paralyse. N’ayez pas peur du monde, ni de l’avenir, ni de votre faiblesse. Le Seigneur vous a donné de vivre en ce moment de l’histoire, pour que, grâce à votre foi, son Nom retentisse sur toute la terre. »


« Si vous demeurez dans l’amour du Christ, enracinés dans la foi, vous rencontrerez, même au milieu des contradictions et des souffrances, la source de la joie et de l’allégresse. »


« La foi ne s’oppose pas à vos idéaux les plus élevés ; au contraire, elle les exalte et les porte à leur perfection. »

« Le Seigneur appelle beaucoup d’entre vous au mariage, où un homme et une femme, en ne formant qu’une seule chair (cf. Gn 2, 24), se réalisent en une profonde vie de communion. »


« À d’autres, en revanche, le Christ lance un appel à le suivre de plus près dans le sacerdoce et la vie consacrée. »

Le Pape, après la messe solennelle célébrée le dimanche 21 aout 2011 a pris congés de ses amis jeunes en souhaitant qu’ils retournent maintenant chez eux comme des missionnaires de l’Évangile « enracinés dans le Christ et édifiés par Lui, fermes dans la foi ». Le rendez-vous est pris pour le Brésil en 2013.

vendredi 19 août 2011

CHRIST, PIERRE ET L’ÉGLISE … !

XXI DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE (A)
COMMENTAIRE D’ENSEMBLE DES TEXTES
(Is 22, 19-23 / Rm 11, 33-36 / Mt 16, 13-20 )

Plus que les deux autres textes, l’évangile de ce dimanche et son interprétation a été et reste sujet à plusieurs malentendus. Bien conscients de ces questions sans cesse soulevées, notre méditation veut essayer de contempler le lien que Christ lui-même fait entre sa personne, son identité et l’apôtre Pierre et sa mission.

D’Elyakim à Pierre, Dieu fait confiance à l’homme !

Shebna dont le signifie « vigueur, énergie », était certainement pressenti pour être l’élu de YHWH. Contre toute attente, ce maître du palais et gouverneur de la cours des rois de Jérusalem, sera démis de ses fonctions. Il n’est plus en odeur de sainteté peut être parce qu’il a flirté avec l’Égypte et a tiré profit de sa position. YHWH choisit Elyakim, comme son intendant. C’est lui qui revêtira la tunique, l’écharpe… Il est établi « père » pour Jérusalem et pour Juda. Il reçoit les clés : « s’il ouvre personne ne fermera, s’il ferme personne n’ouvrira » (Is 22,22). Et pourtant, c’est un homme, un pauvre pécheur comme tous les autres ! Entre Elyakim et Pierre, l’histoire est celle où Dieu se sert de l’homme comme « instrument » pour continuer de se révéler aux hommes de ce temps et de tous les temps.

Sur cette Pierre, je bâtirai mon Eglise !

« Pour toi, qui suis-Je ? » Ce ne sont pas les opinions en vogue qui intéressent Jésus. Pierre va droit au but et professe sa foi au Christ Messie, Fils du Dieu vivant. Par là, nous sommes tous invités à entrer dans cette foi. Pierre reçoit un autre nom, signe de sa nouvelle mission, signe d’une nouvelle vie. Cette vie nouvelle est celle qu’ouvre le Christ pour tous ceux et celles qui au nom des apôtres de tous temps, accueilleront l’évangile. Cette Église ou communauté nouvelle, repose textuellement sur la personne de Pierre comme homme à qui l’Esprit de Dieu a révélé l’identité vraie du sauveur Jésus-Christ. Pierre est un pauvre pécheur à qui Dieu confie sa communauté, structure humaine pour continuer de s’incarner dans l’histoire : « Et moi Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps.» (Mt 28,20) Christ Ressuscité des morts continue de vivre dans le monde et de le transformer à travers cette structure qu’est l’Eglise. C’est Christ Jésus lui même qui a voulu l’Église et la bâtit, signe de sa confiance en l’homme et instrument de sa miséricorde. Les clés que Pierre reçoit ne sont pas signe d’un pouvoir politique temporel mais bien symbole de l’humilité dans l’administration, humilité d’action et de pouvoir qui éveille et ouvre les cœurs et les esprits à la richesse transformatrice et salvifique de la Parole de Dieu. La métaphore « lier-délier » exprime le service de vigilance et de discernement de ce qui est conforme ou non à la foi, la vraie foi en Christ telle que professée.

Tout par le Christ en son Eglise !

C’est ainsi que Jésus fonde la communauté de ceux qui le reconnaîtront Messie et Fils du Dieu vivant. Il établit Pierre et ceux qui viendront après lui, dans ce ministère de guide comme jadis Moïse pour le peuple élu. L’édification de l’Église est un mystère insondable de l’Amour divin. Elle est le signe que de « chair et sang » c’est-à-dire d’hommes et femmes pécheurs et marqué de nos limites existentielles, nous sommes capables du salut de Dieu pour le rayonner dans la vie de nos sœurs et frères de ce temps. L’Église est indicatrice du chemin de salut, l’icône de l’Amour divin. Christ vit en son Église et dans la vie et l’enseignement de Pierre de tous les temps et d’aujourd’hui.

P. Chelbin Alfred Wanyinou HONVO, bibliste.

samedi 13 août 2011

CHRIST, SALUT POUR TOUS LES PEUPLES … !

XX DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE (A)
COMMENTAIRE D’ENSEMBLE DES TEXTES
(Is 56, 1.6-7 / Rm 11, 13-15.29-32 / Mt 15, 21-28 )


Christ Jésus par son Esprit, sème les germes du salut, dans le cœur de tout homme, pour ceux qui croient et pour ceux dans le cœur desquels, invisiblement agit la grâce. En Lui, le salut devient « Bien commun » pour tous. L’épisode de la cananéenne élargit l’horizon de la mission du Christ aux dimensions de l’universel.

1. Mon Temple, maison de prière pour tous les peuples !
Après l’exil, Israël se retrouve en face d’une nouvelle réalité : il doit vivre avec les étrangers, les païens et tous non juifs qui entre temps sont devenus croyants et « attachés au service du Seigneur pour l’amour de son nom ». En cette situation, Dieu inaugure une nouvelle justice où son Amour déborde les confins d’Israël. L’exclusivisme juif est fini. Les vrai fils de Dieu sont ceux qui observent le droit et la justice, ceux obéissent à l’alliance, qui font la volonté de YHWH et non plus ceux qui s’en tiennent uniquement aux « œuvres de la loi ». Les exclus d’hier (eunuques, étrangers, païens) sont justifiés et admis au culte du vrai Dieu en son Temple. La foi de la païenne de l’évangile est l’expression vivante non pas seulement de cette universalité du salut mais de son unicité dans la personne du Christ. Christ Jésus est richesse de salut qui déborde le cadre où nous avons tendance à le confiner.


2. Christ, « Bien commun » pour juifs et païens !
On trouve rarement dans les évangiles quelque passage où Jésus se fait longuement prier avant d’agir comme c’est le cas aujourd’hui. Pour les hébreux, les païens étaient non seulement des idolâtres exclus du banquet messianique, mais ils sont considérés comme des « chiens »: « il n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le donner aux chiens ». Devant la douleur d’une femme aussi éprouvée, « l’indifférence ou le refus apparents de Jésus », montrent aux disciples et à nous que la prière insistante qui jaillit de la foi, déclenche l’intervention du Christ et de ses libéralités au-delà même de nos barrières culturelles et religieuses. En tant que païenne, la cananéenne revendique son droit aux « miettes de pains », grâce de salut à part entière pour tous. Elle a de la répartie. Elle gagne le débat sur Jésus-Christ pour révéler l’unicité du salut que Christ a apporté à l’humanité. « Hors de moi, vous ne pouvez rien faire » (Jn 15,5). Cette unicité du salut est au profit et au bénéfice de tous les peuples.

3. En Christ, Dieu fait miséricorde à tous !
Devant la foi, la catégorisation chiens/fils tombe. En Christ, tous sont fils et filles, citoyens du nouvel Israël issu de l’unique sacrifice rédempteur. Par ce sacrifice, Il fait miséricorde à tous, d’abord aux juifs et ensuite aux gentils, à tous les peuples. La désobéissance des uns et des autres révèle la miséricorde de Dieu. Singulièrement, la grâce du pardon offerte aux païens deviendra la base de miséricorde pour le peuple élu qui s’obstine dans la permanence de la non reconnaissance du Christ. L’expérience de Paul et celle de la cananéenne révèlent que l’universalité et l’unicité du salut en Christ. Christ n’est ni élément ni facteur d’exclusion, mais plutôt « d’union et d’agrégation ». (B. Sesboué).

Père Chelbin Alfred Wanyinou HONVO, bibliste.

mercredi 10 août 2011

Relecture pour la jeunesse africaine du message du Pape pour les J.M.J 2011 (2)


Paragraphe 1

Aux sources de vos plus grandes aspirations



Deux idées essentielles sont à retenir du second paragraphe du message du Saint-Père : l’aspiration profonde des jeunes à « la vérité dans les relations entre les personnes » et « leur droit » de recevoir des générations précédentes des repères clairs pour la vie.

Au-delà de tout ce que l’on pourrait reprocher aux jeunes, il existe au fond de leur cœur une profonde aspiration à la vérité, une profonde recherche d’un grand idéal de vie. Benoit XVI n’hésite pas à évoquer sa propre jeunesse marquée certes par la dictature du national-socialisme et la guerre sans manquer de constituer un temps de recherche de ce qui est « grand », car poursuit-il, « l’homme est vraiment créé pour ce qui est grand, pour l’infini. Tout le reste est insuffisant, insatisfaisant.» Ce que décrit le Pape reste vrai pour la jeunesse africaine. Beaucoup de jeunes africains veulent aujourd’hui construire une vie harmonieuse, ordonnée et basée sur des valeurs. Le désordre, la paresse, le goût du gain facile et la débauche ne sont pas des fatalités au niveau de la jeunesse africaine et une généralisation hâtive des travers observés ici et là ne relèverait purement et simplement que de la fantaisie.
La première interpellation de ce paragraphe réside, à notre sens, dans le « droit » des jeunes de recevoir des adultes « des repères clairs » pour la vie, en d’autres termes, le « devoir » des adultes de transmettre, d’offrir des valeurs aux jeunes par une vie exemplaire. D’après le discours du Pape, la transmission des valeurs, des repères pour la vie ne relève pas d’un souhait mais devient un impératif. Il ne peut en être autrement pour la survie de la société elle-même. Quelles valeurs transmet aujourd’hui notre société africaine aux jeunes ? En quoi les adultes d’aujourd’hui constituent-ils des repères, des modèles, des vecteurs de valeurs et de vertus pour les jeunes ?
Dans le domaine social, pourrait-on parler de « vérité dans les relations entre personnes » quand la trahison, la perte du sens de la parole donnée, pour des intérêts économiques sont en passe de devenir ordinaires ? L’idéal de « l’amour vrai » saurait-il germer dans la jeune génération avec la multiplication des divorces, des familles monoparentales dans lesquelles elle voit défiler les variés et saisonniers compagnons ou compagnes du parent resté seul après le divorce ?
Et que dire du politique chez nous ? Serait-il possible d’évoquer la « vérité dans les relations entre personnes » sur ce champ qui inspire aujourd’hui dégoût et rejet aux jeunes quand ils ne sont pas instrumentalisés pour quelques miettes ? Le manque criard de conviction, de vision et de personnalité, les revirements spectaculaires et autres trahisons, les « achats » de personnes et de votes, les processus électoraux calamiteux débouchant parfois sur des conflits armés, les guerres civiles de ces dernières années creusent, dans l’esprit des jeunes africains, des sillons dont nul ne saurait imaginer la profondeur et les effets à moyen et long termes.
Par ailleurs, les errements du boom religieux, marqué par une énorme quantité de sectes toutes tendances confondues, qui ont pris d’assaut le continent ces dernières années, ne manquent pas au décor et ne sont pas porteurs de valeurs, de repères sûrs pour la vie. Les conflits interminables à paramètres autres que spirituels, les scandales retentissants désorientent les jeunes et ralentissent, à défaut de l’interrompre, leur difficile ascension vers les hauteurs escarpées d’une vie orientée et centrée sur les valeurs.
En somme, si les jeunes sont appelés à réveiller en eux, l’aspiration à ce qui est grand et noble, les adultes doivent, pour leur part, dans les domaines social, politique et religieux, remplir leur devoir de transmission des valeurs et des repères sûrs aux jeunes par l’exemplarité de leur vie.

samedi 6 août 2011

N’AYEZ PAS PEUR, JE SUIS LÁ … !


XIX DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE (A)
COMMENTAIRE D’ENSEMBLE DES TEXTES
(I R 19, 8b-9a.11-13a / Rm 9, 1-5 / Mt 14, 22-33
)


L’évangile et les textes de ce dimanche peuvent être situés et lus à partir de l’histoire des premiers siècles où les jeunes communautés acquises au Christ, étaient confrontées à 3 difficultés majeures : les persécutions de l’Empire romain, les persécutions venues du judaïsme et les divisions internes survenant entre chrétiens issus du judaïsme et ceux venus du monde gréco-romain. A chaque époque ses persécutions et souffrances. A chaque chrétien ses difficultés, ses problèmes et tristesses... Et Christ nous répond : « courage n’ayez pas peur ! Je suis là »…

1. Sors de ta caverne et mets toi en sa Présence !

Fatigué et épuisé de fuir devant les persécutions de la reine Jézabel, Elie fuit au désert puis se cache dans une caverne du mont Horeb. Sa tentative n’est pas seulement une fuite mais aussi la douloureuse expérience de son échec, l’ « échec de Dieu ». Elie est caché dans la caverne. Il est resté fidèle à YHWH qui lui demande de « sortir à sa présence ». Nonobstant les souffrances il faut reconquérir le courage de sortir et de se remettre en présence de Dieu pour recomposer notre vie intérieure et extérieure détruite par le péché et toutes sortes d’épreuves. Il faut reconquérir le courage de se remettre à l’écoute divine qui nous dit « avance en ma présence ».

2. Avance au nom du Christ !

Jésus marche sur les eaux houleuses de la mer. Il va à la rencontre des disciples qu’il a obligé de partir pour ne pas tomber dans la tentation du succès facile et de popularité banale… En le voyant, les disciples eurent peur : « c’est un fantasme ! ». Pourquoi voulons-nous imposer à Dieu le mode de sa manifestation ? Sa présence agissante en nos vies ne devient-elle pas imperceptible quand nous nous enfermons dans nos schémas et nos peurs, ne considérant que nos difficultés ? Nos souffrances sont après tout, des moments privilégiés pour goûter la proximité divine. L’épisode d’Elie nous ramène à l’alliance. Celui de Pierre et des disciples nous plonge dans l’obéissance à la Parole du Christ. L’obéissance à l’Alliance et à la Parole fonde notre foi et nous enracine en Christ le seul qui peut nous faire faire l’expérience du salut au temps fort des situations tragiques et toutes sortes de vents contraires. La transparence de notre vie à sa Parole obtient pour nous toute justification. Nos doutes deviennent ouverture pour plus de plus de lumière.

3. Dieu est fidèle à son alliance !

Dieu est fidèle à son alliance même quand tous les jours nous faisons le douloureux constat que la souffrance semble prendre le dessus : une Église agitée et persécutée de l’intérieure par l’orgueil et l’incurie spirituelle de certains de ses fils ; une Église corrodée par la haine des forces du mal à l’œuvre dans le monde…, des familles détruites par un divorce, la maladie ou la tragique disparition d’un enfant… Christ nous rassure que c’est bien Lui qui est avec nous. Il nous veut simplement transparents à sa Parole. Paul est triste pour son peuple et déplore que ses frères se soient fermés à cette richesse de salut. L’apôtre évoque ses richesses : l’élection, la présence éternelle de Dieu, l’être fils et filles en Christ, les alliances… Autant de privilèges qui traduisent son Amour pour nous. Il est Dieu-avec-nous et nous sommes son peuple. C’est vrai, Il ne nous abandonne pas au mal.

P. Chelbin Alfred Wanyinou HONVO, bibliste.

vendredi 5 août 2011

Relecture pour la jeunesse africaine du message du Pape pour les J.M.J 2011 (1)






Le Pape Benoit XVI a encore sacrifié à la tradition en adressant cette année un message aux jeunes du monde entier pour la XXVI Journée Mondiale de la Jeunesse. Le plus intéressant est que les messages se suivent et ne se ressemblent pas même s’ils conservent, entre eux, un vigoureux fil conducteur. Il s’agit pour nous, en quelques articles, de faire une relecture de ce magnifique texte destiné à « l’universel » à la lumière du contexte « particulier » de la jeunesse africaine. Pour ce faire, nous suivrons les grandes articulations du message du Pape.


Le Pape Benoit XVI a ouvert ce message par le souvenir positif de la dernière édition tenue à Sydney en 2008 qui lui avait offert l’occasion de vivre avec les jeunes venus du monde entier une « grande fête de la foi. » Celle de cette année qui se tiendra à Madrid rappelle celle de 1989 tenue à Saint-Jacques-de-Compostelle dans le même pays.


La richesse de ce rappel historique se fonde sur la similitude des contextes sociologiques. Celle de 1989 se tenait quelques mois avant la chute du Mur de Berlin qui, comme nous le savons, a marqué un tournant important dans la vie de l’Europe et du monde entier. Aujourd’hui, l’Europe a grand besoin de voir s’écrouler un autre mur, érigé cette fois-ci dans la conscience collective, celui de l’éclipse du sens de Dieu, du relativisme et du nihilisme. La métaphore « éclipse » est bien significative dans la mesure où Dieu est toujours présent mais, il n’est plus le point de mire ; son éclat est masqué dans les consciences par le relativisme[1], un ensemble de doctrines ayant pour base commune l’inexistence ou mieux le refus d’une référence absolue et transcendante au savoir et à l’agir humains. Si, en chassant l’absolu et le transcendant, le relativisme a posé, à sa place, le sujet individuel, le nihilisme[2], pour sa part, a purement et simplement remplacé ce dernier par le « néant ».


C’est donc à des jeunes vivant dans cette ambiance culturelle qui limite leur horizon en les confinant dans une existence difficile à tenir, des jeunes à qui sont proposées constamment l’incertitude, la mobilité, la superficialité et la volubilité comme valeurs, que le Pape adresse un message volontairement à contre-courant : « Enracinés et fondés en Christ, affermis dans la foi » (Col 2, 7). En lieu et place de la mobilité, de la superficialité et de l’incertitude ou scepticisme exacerbé, le Pape propose respectivement l’enracinement, le fondement et la foi ou l’adhésion totale et personnelle au Christ, défini comme Chemin, Vérité et Vie (Jn 14, 16).


Si l’éclipse du sens de Dieu n’est pas encore[3] très visible dans notre contexte africain, il convient de reconnaitre qu’un certain vent de relativisme appelé à s’intensifier les années à venir grâce aux moyens de communication souffle déjà sur la jeunesse africaine, cible privilégiée des feux nourris de plusieurs courants de pensée « souvent importés » qui remettent nettement en cause la conception et la pratique traditionnelles du christianisme en général et du catholicisme en particulier. C’est dire toute l’actualité du message du Pape que nous aurons l’occasion d’approfondir au fur et à mesure.

[1] Le relativisme est pluriel : il est philosophique, culturel, épistémologique, éthique. Dans le message du Pape, le relativisme ambiant consiste à dire que tout se vaut et qu’il n’y a aucune vérité ni aucun repère absolu. cf. § 1.
[2] L’écrivain russe Ivan Turgenev, l’un des premiers à utiliser le terme dans son roman Père et fils, (1862) peint un personnage nihiliste, Basarov. Puis après, il fait définir le nihiliste à un autre personnage comme un homme qui ne s’incline devant aucune autorité, qui ne croit à aucun principe quel que soit le respect qui l’a toujours entouré.
[3] L’adverbe “encore” est ici important. Le légendaire sens religieux de l’africain n’est pas, à notre sens, un acquis définitif. Le caractère dynamique des réalités sociologiques et l’étude systématique du processus du sécularisation de l’Europe nous imposent l’impérieuse tâche de cultiver cette valeur africaine sous peine de la voir se perdre sous peu.

MESSAGE DU PAPE POUR LES JOURNEES MONDIALES DE LA JEUNESSE 2011 A MADRID.



Enracinés et fondés en Christ, affermis dans la foi"

(Col 2, 7)

Chers jeunes,

(…) A présent, à l'heure où l'Europe a un très grand besoin de retrouver ses racines chrétiennes, nous avons rendez-vous à Madrid, avec le thème : « Enracinés et fondés en Christ, affermis dans la foi (Col 2, 7) ». Je vous invite donc à cet évènement si important pour l'Eglise en Europe et pour l'Eglise universelle. Et je voudrais que tous les jeunes, aussi bien ceux qui partagent notre foi en Jésus Christ, que ceux qui hésitent, doutent ou ne croient pas en Lui, puissent vivre cette expérience qui peut être décisive pour leur vie : faire l'expérience du Seigneur Jésus ressuscité et vivant, et de son amour pour chacun de nous.

1. Aux sources de vos plus grandes aspirations

A chaque époque, et de nos jours encore, de nombreux jeunes sont habités par le profond désir que les relations entre les personnes soient vécues dans la vérité et dans la solidarité. Beaucoup manifestent l'aspiration à construire de vraies relations d'amitié, à connaître un amour vrai, à fonder une famille unie, à atteindre une stabilité personnelle et une réelle sécurité, qui puissent leur garantir un avenir serein et heureux.
Certes, me souvenant de ma jeunesse, je sais bien que stabilité et sécurité ne sont pas des questions qui occupent le plus l'esprit des jeunes. S'il est vrai que la recherche d'un emploi qui permette d'avoir une situation stable est un problème important et urgent, il reste que la jeunesse est en même temps l'âge de la recherche d'un grand idéal de vie. (…) Désirer quelque chose de plus que la routine quotidienne d'un emploi stable et aspirer à ce qui est réellement grand, tout cela fait partie de la jeunesse. Est-ce seulement un rêve inconsistant, qui s'évanouit quand on devient adulte ? Non, car l'homme est vraiment créé pour ce qui est grand, pour l'infini. Tout le reste est insuffisant, insatisfaisant. Saint Augustin avait raison : notre cœur est inquiet tant qu'il ne repose en Toi. Le désir d'une vie plus grande est un signe du fait qu'Il nous a créés, que nous portons son «empreinte». Dieu est vie, et pour cela, chaque créature tend vers la vie. De façon unique et spéciale, la personne humaine, faite à l'image et la ressemblance de Dieu, aspire à l'amour, à la joie et à la paix.
Nous comprenons alors que c'est un contresens de prétendre éliminer Dieu pour faire vivre l'homme ! Dieu est la source de la vie : l'éliminer équivaut à se séparer de cette source et, inévitablement, se priver de la plénitude et de la joie : “en effet, la créature sans Créateur s'évanouit” (Concile Vatican II, Gaudium et Spes, 36). La culture actuelle, dans certaines régions du monde, surtout en Occident, tend à exclure Dieu ou à considérer la foi comme un fait privé, sans aucune pertinence pour la vie sociale. Alors que toutes valeurs qui fondent la société proviennent de l'Evangile - comme le sens de la dignité de la personne, de la solidarité, du travail et de la famille -, on constate une sorte d'”éclipse de Dieu”, une certaine amnésie, voire un réel refus du christianisme et un reniement du trésor de la foi reçue, au risque de perdre sa propre identité profonde.
Pour cette raison, chers amis, je vous invite à intensifier votre chemin de foi en Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ. Vous êtes l'avenir de la société et de l'Eglise ! Comme l'apôtre Paul l'écrivait aux chrétiens de la ville de Colosse, il est vital d'avoir des racines, des fondements solides ! Et cela est particulièrement vrai aujourd'hui, quand beaucoup de jeunes n'ont pas de repères stables pour construire leur vie, ce qui engendre en eux une grande insécurité. Le relativisme ambiant, qui consiste à dire que tout se vaut et qu'il n'y a aucune vérité ni aucun repère absolu, n'engendre pas la vraie liberté mais instabilité, déception, conformisme aux modes du moment. Vous, les jeunes, vous avez le droit de recevoir des générations qui vous précèdent des repères clairs pour faire vos choix et construire votre vie, comme une jeune plante a besoin d'un tuteur, durant le temps nécessaire pour pousser des racines, pour devenir un arbre solide, capable de donner du fruit.

2. Enracinés et fondés dans le Christ

Pour mettre en lumière l'importance de la foi en Dieu dans la vie des croyants, je voudrais m'arrêter sur les trois expressions employées par saint Paul dans cette citation : «Enracinés et fondés en Christ, affermis dans la foi». Nous pouvons y voir trois images. «Enraciné» évoque l'arbre et les racines qui le nourrissent. «Fondé» se réfère à la construction de la maison. «Affermi» renvoie à la croissance de la force physique ou morale (…) c'est le Christ lui-même qui a l'initiative d'enraciner, de fonder et d'affermir les croyants.
La première image est celle de l'arbre, solidement planté au sol par ses racines, qui le stabilisent et le nourrissent. Sans racines, il serait emporté par le vent et mourrait. Quelles sont nos racines ? Il y a bien sûr nos parents, notre famille et la culture de notre pays, qui constituent un aspect très important de notre identité. La Bible en dévoile un autre. Le prophète Jérémie écrit : « Béni l'homme qui se confie dans le Seigneur, dont le Seigneur est la foi. Il ressemble à un arbre planté au bord des eaux, qui tend ses racines vers le courant : il ne redoute rien quand arrive la chaleur, son feuillage reste vert; dans une année de sècheresse, il est sans inquiétude et ne cesse de porter du fruit. » (Jr 17, 7-8).
Etendre ses racines, c'est donc pour Jérémie mettre sa confiance en Dieu, dans la foi. En Dieu nous puisons notre vie. Sans lui nous ne pouvons pas vivre vraiment. « Dieu nous a donné la vie éternelle et cette vie est dans son Fils » (1 Jn 5, 11). Et Jésus lui-même se présente comme notre vie (Jn 14, 6). C'est pourquoi la foi chrétienne ne consiste pas seulement à croire en des vérités, mais c'est avant tout une relation personnelle avec Jésus Christ. C'est la rencontre avec le Fils de Dieu qui donne à notre vie un dynamisme nouveau. Quand nous entrons dans une relation personnelle avec Lui, le Christ nous révèle notre propre identité, et, dans cette amitié, la vie grandit et se réalise en plénitude.
Il y a un moment, durant la jeunesse, où chacun de nous se demande : quel sens a ma vie ? Quel but, quelle direction ai-je le désir de lui donner? C'est une étape fondamentale, qui peut tourmenter l'âme, parfois même longtemps. On pense au genre de travail à entreprendre, aux relations sociales à établir, aux relations sentimentales à développer . (…)
De même que l'arbre a des racines qui le tiennent solidement accroché à la terre, de même les fondations donnent à la maison une stabilité durable. Par la foi, nous sommes fondés en Christ (cf Col 2, 6), comme une maison est construite sur ses fondations. Dans l'histoire sainte, nous avons de nombreux exemples de saints qui ont fondé leur vie sur la Parole de Dieu. (…) Etre fondé en Christ, c'est répondre concrètement à l'appel de Dieu, en mettant notre confiance en Lui et en mettant en pratique sa Parole. Jésus lui-même met en garde ses disciples : « Pourquoi m´appelez-vous : ´Seigneur! Seigneur !´ et ne faites-vous pas ce que je dis ? » (Lc 6, 46). Et, faisant alors appel à l'image de la construction de la maison, il ajoute : « Quiconque vient à moi, écoute mes paroles et les met en pratique, je vais vous montrer à qui il est comparable. Il est comparable à un homme qui, bâtissant une maison, a creusé, creusé profond, et posé les fondations sur le roc. La crue survenant, le torrent s´est rué sur cette maison, mais il n´a pas pu l´ébranler parce qu’elle était bien bâtie. Mais celui au contraire qui a écouté et n'a pas mis en pratique est comparable à un homme qui aurait bâti sa maison à même le sol, sans fondations. Le torrent s´est rué sur elle, et aussitôt elle s´est écroulée ; et le désastre survenu à cette maison a été grand ! » (Lc 6, 46-49).
Chers amis, construisez votre maison sur le roc, comme cet homme qui « a creusé profond ». Vous aussi, efforcez-vous tous les jours de suivre la Parole du Christ. Ecoutez-le comme l'Ami véritable avec qui partager le chemin de votre vie. Avec Lui à vos côtés, vous serez capables d'affronter avec courage et espérance les difficultés, les problèmes, ainsi que les déceptions et les échecs. Sans cesse vous sont présentées des propositions plus faciles, mais vous vous rendez compte vous-mêmes qu'il s'agit de leurres, qu'elles ne donnent ni sérénité, ni joie. Seule la Parole de Dieu nous indique la voie véritable, seule la foi qui nous a été transmise est la lumière qui illumine notre chemin. Accueillez avec gratitude ce don spirituel que vous avez reçu de votre famille et engagez-vous à répondre de façon responsable à l'appel de Dieu, devenant adultes dans la foi. Ne croyez pas ceux qui vous disent que vous n'avez pas besoin des autres pour construire votre vie ! Appuyez-vous au contraire sur la foi de vos proches, sur la foi de l'Eglise, et remerciez le Seigneur de l'avoir reçue et de l'avoir faite vôtre !

3. Affermis dans la foi




Soyez « enracinés et fondés en Christ, affermis dans la foi » (Col 2, 7). La lettre d'où vient cette citation a été écrite par saint Paul pour répondre à un besoin précis des chrétiens de la ville de Colosse. Cette communauté, en effet, était menacée par l'influence de certaines tendances de la culture de l'époque, qui détournaient les fidèles de l'Evangile. Notre contexte culturel, chers jeunes, a de nombreuses ressemblances avec celui des Colossiens d'alors. En effet, il y a un fort courant «laïciste», qui veut supprimer Dieu de la vie des personnes et de la société, projetant et tentant de créer un «paradis» sans Lui. Or l'expérience enseigne qu'un monde sans Dieu est un «enfer» où prévalent les égoïsmes, les divisions dans les familles, la haine entre les personnes et les peuples, le manque d'amour, de joie et d'espérance. A l'inverse, là où les personnes et les peuples vivent dans la présence de Dieu, l'adorent en vérité et écoutent sa voix, là se construit très concrètement la civilisation de l'amour, où chacun est respecté dans sa dignité, où la communion grandit, avec tous ses fruits. Il y a cependant des chrétiens qui se laissent séduire par le mode de penser laïciste, ou qui sont attirés par des courants religieux qui éloignent de la foi en Jésus Christ. D'autres, sans adhérer à de telles approches, ont simplement laissé refroidir leur foi au Christ, ce qui a d'inévitables conséquences négatives sur le plan moral.
Aux frères contaminés par ces idées étrangères à l'Evangile, l'apôtre Paul rappelle la .puissance du Christ mort et ressuscité. Ce mystère est le fondement de notre vie, le centre de la foi chrétienne. (…) Nous croyons fermement que le Christ Jésus s'est offert sur la Croix pour nous donner son amour. Dans sa passion, il a porté nos souffrances, il a pris sur lui nos péchés, il nous a obtenu le pardon et nous a réconciliés avec Dieu le Père, nous donnant accès à la vie éternelle. De cette façon, nous avons été libérés de ce qui entrave le plus notre vie : l'esclavage du péché. Nous pouvons alors aimer tous les hommes, jusqu'à nos ennemis, et partager cet amour avec les plus pauvres et les plus éprouvés de nos frères.
Chers amis, la Croix nous fait souvent peur, car elle semble être la négation de la vie. En réalité, c'est le contraire ! Elle est le «oui» de Dieu à l'homme, l'expression extrême de son amour et la source d'où jaillit la vie. Car du cœur de Jésus ouvert sur la Croix a jailli cette vie divine, toujours disponible pour celui qui accepte de lever les yeux vers le Crucifié. Je ne peux donc que vous inviter à accueillir la Croix de Jésus, signe de l'amour de Dieu, comme source de vie nouvelle. En dehors du Christ mort et ressuscité, il n'y a pas de salut ! Lui seul peut libérer le monde du mal et faire grandir le Royaume de justice, de paix et d'amour auquel nous aspirons tous.

4. Croire en Jésus sans le voir

(…) Nous aussi nous voudrions pouvoir voir Jésus, pouvoir parler avec Lui, sentir encore plus fortement sa présence. Aujourd'hui, pour beaucoup de personnes, l'accès à Jésus est devenu difficile. (…)
Jésus lui-même, en effet, apparaissant de nouveau huit jours après aux disciples, dit à Thomas : « Porte ton doigt ici : voici mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté, et ne deviens pas incrédule, mais croyant » (Jn 20, 26-27). Nous aussi nous pouvons avoir un contact sensible avec Jésus, mettre, pour ainsi dire, la main sur les signes de sa Passion, les signes de son amour : dans les Sacrements, Il se fait particulièrement proche de nous, Il se donne à nous. Chers jeunes, apprenez à «voir», à «rencontrer» Jésus dans l'Eucharistie, là où Il est présent et proche jusqu'à se faire nourriture pour notre chemin ; dans le Sacrement de la Pénitence, dans lequel le Seigneur manifeste sa miséricorde en offrant son pardon. Reconnaissez et servez Jésus aussi dans les pauvres, les malades, les frères qui sont en difficulté et ont besoin d'aide.
Ouvrez et cultivez un dialogue personnel avec Jésus Christ, dans la foi. Connaissez-le par la lecture des Evangiles et du Catéchisme de l'Eglise Catholique. Entrez dans un dialogue avec Lui par la prière, donnez-lui votre confiance : il ne la trahira jamais ! « La foi est d'abord une adhésion personnelle de l'homme à Dieu; elle est en même temps, et inséparablement, l'assentiment libre à toute la vérité que Dieu a révélé » (Catéchisme de l'Eglise Catholique, 150). Ainsi vous pourrez acquérir une foi mure, solide, qui ne sera pas fondée uniquement sur un sentiment religieux ou sur un vague souvenir du catéchisme de votre enfance. Vous pourrez connaitre Dieu et véritablement vivre de lui, comme l'apôtre Thomas quand il manifeste sa foi en Jésus en s'exclamant avec force : « Mon Seigneur et mon Dieu ! »

5. Soutenus par la foi de l'Eglise, pour être témoins

A ce moment, Jésus s'exclama : « Parce que tu me vois, tu crois. Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru » (Jn 20, 28). Il pensait au chemin de l'Eglise, fondée sur la foi des témoins oculaires, les Apôtres. Nous comprenons alors que notre foi personnelle en Christ, née d'un dialogue irremplaçable avec lui, est liée à la foi de l'Eglise : nous ne sommes pas des croyants isolés, mais, par le Baptême, nous sommes membres de cette grande famille, et c'est la foi professée par l'Eglise qui donne assurance à notre foi personnelle. Le Credo que nous proclamons lors de la Messe du dimanche nous protège justement du danger de croire en un Dieu qui n'est pas celui que Jésus nous a révélé : « Chaque croyant est ainsi comme un maillon dans la grande chaîne des croyants. Je ne peux croire sans être porté par la foi des autres, et par ma foi, je contribue à porter la foi des autres » (Catéchisme de l'Eglise Catholique, 166). Remercions sans cesse le Seigneur pour le don de l'Eglise. Elle nous fait progresser avec assurance dans la foi, qui nous donne la vraie vie (cf. Jn 20, 31).
Dans l'histoire de l'Eglise, les saints et les martyrs ont puisé au pied de la Croix glorieuse du Christ la force d'être fidèles à Dieu jusqu'au don d'eux-mêmes. Dans la foi, ils ont trouvé la force pour vaincre leurs propres faiblesses et dépasser chaque adversité. Car, comme le dit l'apôtre Jean : « Quel est le vainqueur du monde, sinon celui qui croit que Jésus est le Fils de Dieu ? » (1 Jn 5, 5). Et la victoire qui nait de la foi est celle de l'amour. Tant de chrétiens ont été et sont un témoignage vivant de la force de la foi qui s'exprime par la charité : ils ont été artisans de paix, promoteurs de justice, acteurs d'un monde plus humain, un monde selon Dieu. Ils se sont engagés dans divers domaines de la vie sociale, avec compétence et professionnalisme, contribuant efficacement au bien de tous. La charité qui jaillit de la foi les a conduits à un témoignage très concret, en actes et en paroles : le Christ n'est pas seulement un bien pour nous-mêmes, il est le bien le plus précieux que nous avons à partager avec les autres. Et à l'heure de la mondialisation, soyez les témoins de l'espérance chrétienne dans le monde entier : nombreux sont ceux qui désirent recevoir cette espérance ! Devant le tombeau de son ami Lazare, qui était mort depuis quatre jours, et avant de le ramener à la vie, Jésus dit à Marthe : « Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu » (Jn 11, 40). Vous aussi, si vous croyez, si vous savez vivre et témoigner de votre foi chaque jour, vous deviendrez instruments pour faire retrouver à d'autres jeunes comme vous le sens et la joie de la vie, qui nait de la rencontre avec le Christ !

6. Vers la Journée Mondiale de Madrid




Chers amis, je vous renouvèle l'invitation à venir à la Journée Mondiale de la Jeunesse à Madrid. Avec une joie profonde, je vous attends chacun personnellement : le Christ lui-même veut vous affermir dans la foi par l'Eglise. Le choix de croire en Christ et de le suivre n'est jamais facile. Il est toujours entravé par nos infidélités personnelles et par tant de voix qui indiquent des sentiers plus faciles. Ne vous laissez pas décourager, cherchez plutôt le soutien de la communauté chrétienne, le soutien de l'Eglise ! Au cours de cette année, préparez-vous intensément au rendez-vous de Madrid avec vos évêques, vos prêtres et les responsables de la pastorale des jeunes dans les diocèses, les communautés paroissiales, les associations et les mouvements. La qualité de notre rencontre dépendra pour une grande part de la préparation spirituelle, de la prière, de l'écoute commune de la Parole de Dieu et du soutien mutuel.
Chers jeunes, l'Eglise compte sur vous ! Elle a besoin de votre foi vivante, de votre charité créative et du dynamisme de votre espérance. Votre présence renouvèle l'Eglise, la rajeunit et lui donne un élan nouveau. C'est pourquoi les Journées Mondiales de la Jeunesse sont une grâce non seulement pour vous mais aussi pour tout le Peuple de Dieu. L'Eglise en Espagne se prépare activement pour vous accueillir et vivre avec vous la joyeuse expérience de la foi. Je remercie les diocèses, les paroisses, les sanctuaires, les communautés religieuses, les associations et les mouvements ecclésiaux, qui travaillent avec générosité à la préparation de cet évènement. Le Seigneur ne manquera pas de les bénir.
Que la Vierge Marie accompagne ce chemin de préparation ! A l'annonce de l'Ange, elle a accueilli avec foi la Parole de Dieu. Avec foi, elle a consenti à l'œuvre que Dieu accomplissait en elle. En prononçant son «fiat», son «oui», elle a reçu le don d'une charité immense, qui la poussait à se donner tout entière à Dieu. Qu'elle intercède pour chacun et chacune de vous, afin que durant cette prochaine Journée Mondiale, vous puissiez grandir dans la foi et l'amour ! Je vous assure de ma pensée paternelle pour vous dans la prière et je vous bénis de tout cœur.

Du Vatican, le 6 août 2010
Benedictus PP. XVI