samedi 18 décembre 2010

Sur les pas de Joseph

QUATRIÈME DIMANCHE DE L’AVENT (Année Liturgique A)
(Is 7,10-14 / Rm 1,1-7 / Mt 1,18-24)

Les fiançailles en Palestine ancienne au temps du Nouveau Testament était un moment où, bien que ne vivant pas encore ensemble, les fiancés étaient juridiquement liés (Dt 20,7 et 22,23-27) et pour cela, considérés épouse et époux. L’infidélité de la fiancée était vue comme un adultère et au cas où venait à décéder le fiancé, elle devenait veuve. Pendant cette période (eruzin = fiançailles), sont prohibés les rapports intimes surtout dans la région de la Galilée où sévissait une morale très rigide par rapport à la Judée. Tel est en bref, le milieu où Joseph et Marie vivaient leurs fiançailles quand soudain, la maternité s’est manifestée en la jeune future épouse. Quel drame ! Que faut-il faire ? Que faut-il dire ?
Joseph, homme juste et homme de Dieu !
Joseph, pouvait-il la répudier secrètement sans acte juridique
(et donc sans témoins) ? ou s’était-il déjà rendu compte que Dieu avait un projet sacré sur la femme ? Toutes questions possibles ! Mais dans un sens comme dans l’autre, nous sommes en un contexte judaïque galiléen où il n’était pas facile de divorcer sans que les gens le sachent. S’il était possible de le faire, il ne serait pas non plus impossible de considérer que dans un village comme Nazareth, la contiguïté des cases était en faveur de la rapide diffusion des informations et de tout commérage. De toutes les manières, la situation se complique pour Joseph. Le drame atteint son sommet quand subitement l’ange lui apparaît comme en tout récit d’annonciation : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie… » (Mt 1,20). Dans l’expression « prendre chez toi Marie», est signifiée la deuxième et dernière étape de tout mariage juif : l’entrée solennelle de l’épouse chez l’époux (Nissuin=introduction). Dieu invite ainsi l’homme à prendre chez lui non plus seulement Marie son épouse, mais aussi l’Enfant-Dieu à naître. C’est l’appel à prendre conscience de la confiance que Dieu nous fait pour qu’à notre tour, nous puissions avoir confiance en Dieu. Le lecteur devine qu’en tout cela, l’évangéliste met en relief l’être-juste de Joseph et l’ouverture à la grâce qu’ implique sa justice. Il reçoit de Dieu l’indication sur le mystère à venir. Sans bien savoir où la route conduit, il l’accueille sans cesser d’être pleinement homme ou mieux, sans que sa raison capitule. L’exhortation « ne crains pas !» fait voir le degré du drame et dans le même temps procure sécurité à Joseph devant le mystère de Dieu qui dépasse tout entendement humain et au cœur duquel l’homme se perd.
Achaz, homme d’une religiosité sans foi !
Joseph fait confiance et entre dans le projet de Dieu. Le roi Achaz au contraire se ferme à l’initiative divine de protéger le royaume et d’y manifester sa gloire. En effet, devant le péril de la guerre Syro-Ephraimite qui mettait à haut risque Jérusalem et tout le royaume de Judée, Le roi refuse de demander un signe sous prétexte de ne pas tenter Dieu ou de forcer sa volonté. Là s’exprime en réalité, une prétendue religiosité ou respect de Dieu qui cache un manque de foi. C’est à Dieu lui-même qu’Achaz fermait la porte. Mais Dieu est plus grand que le cœur de l’homme. Son Amour se manifeste malgré notre refus car c’est lui qui le premier nous aima. (1 Jn 4,10). Le signe de cet Amour est la promesse de la venue du Messie, l’Enfant-Dieu, signe que Dieu chemine avec l’homme pour le salut. Dieu veut demeurer en nous et faire de nos vies et de chez nous, chez Lui.

Qui est cet Enfant ?
Mathieu nous permet ainsi de méditer le mystère de l’origine divine de l’Enfant-Jésus, l’Enfant-Dieu : « ..ce qui a été engendré en elle (Marie) vient de l'Esprit Saint, et elle enfantera un fils auquel tu donneras le nom de Jésus, car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés » (Mt 1,20-21). Cet Enfant est l’Emmanuel, Dieu-avec-nous annoncé à Achaz, le « Dieu qui sauve des péchés » annoncé à Joseph. Ce mystère d’un Dieu-fait-homme au milieu des hommes est le signe de notre victoire sur le mal et sur les ennemis, signe que Dieu est à l’œuvre dans l’histoire pour la porter à son accomplissement. Cet accomplissement est l’annonce joyeuse et heureuse de notre salut récapitulée en la personne de l’Enfant-Dieu, Jésus-Christ. En sa personne cette Bonne Nouvelle de salut dont Paul se proclame l’heureux serviteur, atteint sa plénitude (Rm 1,1-3). L’action de l’Esprit donne vie à une nouvelle humanité dans le Christ. Dans notre vie et dans notre monde est entré Jésus pour que nous entrions à notre tour, dans la vie et le monde de Dieu.
L’annonce joyeuse de notre être-avec-Dieu
Au-delà d’une simple narration de ce qui s’est passé, les textes d’aujourd’hui nous portent à contempler en un premier temps, l’humilité de Dieu qui entre en notre chair mortelle, l’assume, la réhabilite pour l’élever en dignité ; et en un deuxième temps, l’appel de l’homme à collaborer à ce projet de salut. Somme toute, une fois transformée en Dieu et élevée, notre vie devient protagoniste de cette merveille de la présence vivante de Dieu. Protagonistes, nous pouvons l’être imitant le silence priant de Joseph. Nous pouvons le devenir imitant le zèle priant de Paul, annonciateur de l’évangile du salut, Jésus le Christ. En ces deux figures, nous écoutons la voix de l’Esprit qui nous dit : « puis-Je compter sur toi ?» Par notre foi, nous sommes sûrs qu’il vaut mieux compter sur Dieu mais Dieu peut-Il à son tour compter sur nous ? Joseph s’offre à nous comme un exemple d’humanité ouverte à Dieu. En lui s’est réalisée pour nous la parole de Dieu : « L’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu» (Dt 8,3 ; Mt 4,4). Cette parole qui sort de la bouche de Dieu, c’est bien le Verbe du Père, Jésus le Christ.
Quelles sont en notre vie les situations à travers lesquelles l’Esprit Saint nous invite à nous abandonner comme Joseph à Dieu et à sa volonté ?

Père Chelbin-Alfred Wanyinou HONVO, Bibliste.

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