lundi 3 octobre 2011

LE CNS OU LE CNT (bis) ?



Ce week-end, le CNS (Conseil National Syrien) réunissant toutes les chapelles de l’opposition au régime de Bachar Al-Assad, a été porté sur les fonts baptismaux. C’est à la faveur d’une rencontre à Istanbul, sanctionnée par un communiqué final lu par Burhan Ghalioune, un universitaire basé à Paris. Il disait notamment, « le Conseil syrien est ouvert à la participation de tous les Syriens. C'est un Conseil indépendant qui incarne la souveraineté du peuple syrien dans sa lutte pour la liberté." Le rapprochement entre ce Conseil et celui formé par les opposants libyens saute aux yeux. Pour autant parviendra-t-il au même résultat ? Rien n’est moins sûr.

Le caractère hétérogène dudit conseil qui regroupe les Comités locaux de coordination (LCC) pièce maîtresse des  manifestations en cours en Syrie, les libéraux, les Frères musulmans ainsi que les Kurdes et les Assyriens est un facteur limitatif. L’écart entre les divers courants idéologiques est énorme ; la conception de la nature de l’Etat devant naître est loin de faire l’unanimité. L’apparente union affichée tiendra tant que l’adversaire commun « Bachar Al-Assad » sera encore au pouvoir et poursuivra la même gestion de la contestation populaire.

Le CNT libyen a agi de l’intérieur, aux côtés des jeunes révoltés qui, au prix de leur vie, allaient manifester pour réclamer un autre avenir pour leur pays. Le CNS aura l’handicap d’être une force de l’extérieur, bien à l’abri des balles. De plus, plusieurs autres organisations laïques actives sur le terrain ont déjà pris leur distance à son égard, à cause de la supposée prédominance des Frères Musulmans, craignant une récupération islamiste du mouvement en faveur de la démocratie et des droits de l’homme.

L’appui de la communauté internationale, dans ce cas-ci, sera mitigé. Dans le cas de la Libye, la France qui entendait retrouver un leadership raté dans le cas de la Tunisie et de l’Egypte, a voulu saisir l’opportunité pour un coup d’éclat. Le Président Sarkozy, à quelques mois des élections présidentielles, espérait faire miroiter à son opinion « la gloire et la grandeur » de la  France. Mais la longue durée des opérations, les nombreuses victimes civiles ont lassé l’opinion qui, de plus en plus avertie et hostile à l’ingérence étrangère dans les affaires internes des peuples, croit peu aux campagnes de dénigrement contre tel ou tel dictateur. Pour justifier le renversement de Jean-Bedel BOKASSA, on pouvait  facilement agiter dans les médias son anthropophagie pour susciter l’émotion collective. Aujourd’hui, il en est autrement. Ce coup, son coup qu’il s’est d’ailleurs empressé d’aller célébrer avec le premier ministre britannique, n’aura pas tellement arrangé la popularité en chute libre du président français. Sur le plan économique, le maintien de la plupart des accords établis avant la crise, ne laisse pas présager de gros avantages. Sur le plan diplomatique, la « rhétorique » ayant servi à éviter tout éventuel véto contre la résolution onusienne sur la Libye, aura du mal à fonctionner cette fois-ci. Les partenaires qui y avaient cru, ont maintenant compris et du coup, se raidissent sur le cas de la Syrie. L’historique passage du Sénat français à gauche ces jours-ci devrait préoccuper davantage le président français et le pousser à se  tourner  plus vers la politique intérieure pour sauver ce qui peut l’être encore.

Le président Obama, mis en difficulté par la crise, se tourne aussi de plus en plus vers la politique intérieure. On l’a vu récemment, lors de l’Assemblée générale de l’ONU sur le conflit israélo-palestinien.

Tout ce contexte politique rend difficile une action décisive de la communauté internationale aux côtés de l’opposition syrienne. Enfin la Syrie n’est pas la Libye, on l’aura assez répété depuis le début de la répression. Une action maladroite jetterait immédiatement le feu aux poudres dans la région.

Ceci dit, le sang des manifestants pacifiques n'aura pas coulé en vain même s’il faut envisager, pour les jours à venir,  un essoufflement des manifestations. Chaque pays a son destin.

Vivement que les parties en face en Syrie retrouvent la voie du dialogue pour opérer les inéluctables changements requis par le vent de liberté qui souffle dans le monde et qui n’épargnera aucun pays. La violence ne construit pas ; elle détruit.
           
Père Eric Oloudé OKPEITCHA


1 commentaire:

  1. J'ai beaucoup apprecié ton article, la Syrie n'est pas la Lybie, ni pour sa situation, ni aux yeux de la communauté internationale. Et on doit aussi qu'on n'a encore aucune idée de ce qui se passera en Lybie avec le nouveau gouvernement: et c'est la meme chose pour les autres pays d'Afrique du Nord. Peut-etre la violence va reprendre avec des autres formes... j'espere que non.

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