mercredi 30 mars 2011

Crise ivoirienne : qui paiera les factures ?


La Côte d’Ivoire s’enfonce progressivement dans la violence après l’échec des multiples médiations mises sur pied pour trouver une issue pacifique à une crise qui semble s’éterniser à défaut de lasser l’opinion internationale. Le camp Ouattara - qui contrôlait déjà la moitié nord du pays, aux mains depuis 2002 de la rébellion des Forces nouvelles – dispose maintenant des «trois quarts» à la faveur de l’offensive des rebelles « Forces Nouvelles » devenues entretemps « Forces républicaines ». Plusieurs villes seraient tombées sans résistance y compris Yamoussoukro, la capitale économique, point fort du régime Gbagbo. Alors que ses forces ont lancé des recrutements massifs de jeunes ce mercredi, ce dernier demande sur les antennes de Radio France Internationale, un cessez-le-feu immédiat et l'ouverture du dialogue ; appel aussitôt qualifié par le camp adverse de « diversion », tellement sûr d’avoir épuisé les voies du dialogue et déterminé à recourir à la force pour sortir de crise.

La France tente d’obtenir le vote de sanctions plus dures à l’encontre de Laurent Gbagbo et de ses proches au conseil de sécurité de l’ONU. Des milliers d’ivoiriens tentent de sauver leur vie en fuyant les zones de combats. Il faut attendre quelques jours encore pour certifier la prise des villes citées. La Libye nous aura appris la prudence face aux villes « prises » puis « reconquises » quelques jours après, dans une contre-offensive. Tout compte fait, les ingrédients semblent réunis pour une situation explosive de guerre civile qui serait la énième que connait malheureusement l’Afrique. Espérons qu’une issue pacifique soit trouvée au plus vite.

Le plus important, pour nous aujourd’hui, réside dans l’avenir de ce pays. Que deviendra cette jeunesse manipulée qui s’engage dans le combat dans l’espérance de se faire de l’argent aujourd’hui et d’intégrer à l’avenir l’armée ? quelle est la qualité de la formation qu’elle recevra dans ces conditions avant d’aller aux fronts ? Le militaire n’est pas seulement celui qui sait manipuler les armes. Autrement, il serait l’équivalent d’un braqueur ou bandit de grand chemin. Quelles valeurs éthiques pourrait-on transmettre à cette jeunesse dans un tel contexte ? Les scènes de violence ou de vandalisme projetées par les médias se gravent intimement dans l’inconscient des jeunes et des enfants tout en minant progressivement l’équilibre de leur personnalité. Une jeunesse est en train d’être sacrifiée sur l’autel de l’appétit du pouvoir.

Quelle que soit l’issue de cette crise, le flux des réfugiés dans les pays limitrophes, la paralysie de l’économie nationale, les recrutements tous azimuts de jeunes soldats, les « dépenses de guerre » des deux camps, le ralentissement des investissements, les « accords secrets » signés ici et là, moyennant soutien économique, politique, militaire ou diplomatique, la perturbation du système éducatif, la déstructuration de l’administration publique doublée et politisée, l’anarchie sociale et les mauvaises habitudes prises pendant ces années de troubles sont des factures à payer à l’avenir. Et personne ne le fera à la place des ivoiriens eux-mêmes.

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