jeudi 24 février 2011

Crise libyenne : les héros du respect de la vie

"Ils pourraient être à juste titre considérés comme des héros du respect de la vie, de véritables martyrs qui ont préféré mourir que de faire mourir."

Les crises se succèdent au Maghreb sans se ressembler. Après la Tunisie et l’Egypte, le vent de la révolution populaire mettant fin à plusieurs décennies de dictature arrive en Lybie. Le colonel Kadhafi, instruit par le sort de ses voisins Moubarak et Ben Ali, s’est préparé à affronter ou mieux à contrer la tempête. On parle aujourd’hui de « boucherie », de « génocide », de « répressions massives » perpétrés par des soldats et des mercenaires aux ordres du guide suprême de la révolution libyenne… Ces termes sont à prendre avec la réserve nécessaire de même que les chiffres avancés eu égard à la difficile couverture médiatique de cette crise. En tout état de cause, le moins que l’on puisse dire est que le sang des libyens coule et interpelle la conscience de la communauté internationale frileuse à condamner ouvertement et directement Kadhafi. On est désormais habitué à sa conduite à géométrie variable selon les intérêts en jeu. Le dernier discours belliqueux du colonel qui contraste avec celui du 24 février, n’augure pas de lendemains meilleurs. Comme nous le disions à propos de la crise égyptienne, le propre des dictatures est de ne jamais savoir apprécier le « trop tard ». Les temps ont changé, le monde aussi et pourquoi pas la Libye elle-même. Cela, le guide libyen le comprend difficilement vu la teneur de son discours resté révolutionnaire (le mal, ce sont les autres !). A défaut de le saisir de façon notionnelle, il finira par l’admettre dans les faits. Quelle que soit l’issue des répressions actuelles, le régime a entamé son processus d’implosion après 40 ans de règne sans interruption. La défection de ministres qui commencent par « parler », les démissions en cascade d’ambassadeurs et de hauts gradés de son armée, le passage sous contrôle des manifestants de pans entiers du territoire, la partition en deux de l’opinion nationale (les pour et les contre) en sont les signes épatants pour qui sait voir.
Mais ce que nous voudrions mettre en relief dans ce « carnage » est l’héroïsme des militaires qui ont refusé de bombarder ou de tirer sur des manifestants civils au prix de leur propre vie. Deux chasseurs ont atterri à Malte pour éviter de répandre le sang de leurs compatriotes. Un autre s’écrase avec son appareil pour ne pas obéir à l’ordre de semer la mort. Des médias évoquent des exécutions sommaires de soldats qui ont refusé de mâter les manifestants. Ils pourraient être à juste titre considérés comme des héros du respect de la vie, de véritables martyrs qui ont préféré mourir que de faire mourir. De toute évidence, ils ne jouiront pas des fruits de leur sacrifice sur cette terre des hommes, mais leur acte mérite d’être salué : faire primer la voix de la conscience sur celle du mal, de la vengeance ou de la terreur. Ils pourraient même passer dans l’oubli, rangés simplement au nombre des victimes du soulèvement, mais l’histoire finira par leur faire justice, de même que l’auteur de la vie qui a impérativement demandé à l’homme de respecter la sienne et celle des autres.
La jeunesse africaine est invitée à intérioriser la bravoure de ces héros du respect de la vie pour ne plus se laisser instrumentaliser par les seigneurs de la guerre, assoiffés de sang et de pouvoir qui l’utilisent à de viles fins au grand mépris de la vie qui est éminemment sacrée.

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