mercredi 13 octobre 2010

L’intériorisation, berceau de la réflexion


Nous avions analysé le modèle du copier-coller qui a prévalu dans les relations entre l’Occident et l’Afrique pendant longtemps et surtout durant les 50 dernières années. Et l’évaluation globalement négative des fruits de ce modèle nous a poussé à envisager la réflexion par soi comme premier défi à relever par la jeunesse africaine à qui, la poursuite avec ce paradigme de mimétisme dans les domaines politique, sociale, économique et même culturel n’apportera strictement rien dans le contexte actuel. Mais la réflexion exige, en contrepartie, comme prix à payer, un contexte psychologique : l’intériorisation.
Du fait de l’oralité et d’autres facteurs culturels dans le détail desquels nous n’entendons pas entrer ici, l’africain est spontanément porté à l’extériorisation, à l’exubérance. Entre le culte traditionnel et les réjouissances populaires, la frontière, en termes d’intériorisation du fait vécu, n’est pas trop visible. Certes, le contexte et les circonstances de temps, de lieu et de modalité sont différents. Cette forte extériorisation des sentiments et des émotions est parfois utile pour rendre heureux l’homme qui, par nature, est un être relationnel. D’ailleurs, il s’étouffe et s’étiole à trop se renfermer sur lui-même. Nous le constatons facilement en Occident où l’excessif repli de l’individu sur lui-même conduit souvent, en cas de graves difficultés, au suicide, à la drogue et autres déviances…
Mais la stabilité des relations humaines et la cohérence de vie ne peuvent faire l’économie d’un impératif, la construction, la structuration de l’être intérieur. Et c’est justement à ce niveau que se noue le défi de l’intériorisation qui ne rime pas ici, du moins dans le sens où nous l’envisageons, avec repli sur soi.
Les jeunes africains déjà portés culturellement à l’extériorisation, découvrent un monde dominé par la communication et s’y engouffrent. Pour avoir été enseignant dans un collège pendant plusieurs années, nous avons pu mesurer la grande difficulté à faire régner le silence dans les classes toujours plus bruyantes même en présence du professeur. A l’université, le constat est pratiquement identique. Cet état des choses, ne pourrait en aucun cas, favoriser la concentration requise pour la réflexion. Il urge aujourd’hui que les jeunes africains se paient le luxe du silence et du dialogue intérieur. C’est à cette seule condition qu’ils seront capables d’opérer des reprises de leur vécu en vue de le conformer un tant soit peu à la raison et aux objectifs fondateurs de leur existence.
Les éducateurs, à divers niveaux (écoles, familles, église) sont invités à intégrer en bonne place cette valeur dans leur projet éducatif. Paraphrasant Hegel, nous dirions volontiers que rien de grand ne peut se faire sans un minimum d’aptitude au silence et à la vie intérieure.
Pour être plus concret et plus précis, le jeune africain pourrait s’entrainer à observer systématiquement 10mn de silence le matin au lever, en vue de recentrer les objectifs généraux et ceux spécifiques de la journée. Il pourra ensuite les confier à Dieu dans la prière. Il sera invité à faire le même exercice, à la fin de la journée, mais en termes d’ évaluation pour tout fondre en action de grâce. Les effets de cet exercice apparemment banal seront immenses pour qui oserait s’y livrer constamment. C’est véritablement un premier pas sur la route qui mène vers l’intériorisation, terreau sur lequel germe la réflexion. En définitive, il s’agit d’oser s’offrir le précieux cadeau du silence, devenu aujourd’hui un luxe dans un monde d’hyper-communication mais aussi d’hyper-bruit.






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